★ DOGMATISME

Publié le par Socialisme libertaire

Encyclopédie anarchiste



★ Sélection de l’Encyclopédie anarchiste : 
 

DOGMATISME 
n. m. 

« On peut être dogmatique sans pour cela adhérer à une religion ou à une église. Le dogmatique est celui qui se raidit en une croyance, en une vérité déterminée ou en un groupe de vérités (pour lui naturellement) et qui n’admet pas que d’autres en doutent. Le dogmatisme, c’est le père de l’intolérance politique, religieuse et morale. Combien de personnes qui rient et qui sourient des dogmatiques religieux et qui, à leur tour, sont des religieux dogmatiques vis-à-vis du programme de leur parti ! Hier, les jacobins aujourd’hui les communistes autoritaires sont des dogmatiques. Mais aussi parmi les anarchistes, il y a des mentalités bornées, des esprits arides, des présomptueux sans culture, qui prennent à la lettre et en bloc la pensée des auteurs plus ou moins connus, et de valeur, et ne tolèrent aucune critique ; ils ne s’intéressent à aucune élaboration idéologique, à aucun ajournement des données sur lesquelles les théoriciens construisent leurs théories.

Anarchisme et dogmatisme sont inconciliables. »

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DOGME 
n. m. (du grec doghma, formé de dokéo, je pense)

« Dans son acception commune, ce mot signifie une opinion imposée par une autorité en dehors et au-dessus de toute critique et de tout examen. Dans la religion chrétienne, le dogme est une vérité révélée par Dieu, et directement imposée, par l’Église, à la croyance des fidèles. La révélation est la source du dogme, et son caractère fondamental est l’intangibilité. Le dogmatisme catholique est l’ensemble des dogmes préparés, définis et développés par les Pères de l’Église, par les Conciles et par les Papes. Les trois dogmes fondamentaux sont : Jésus, l’homme et Dieu ; Dieu, en une et en trois personnes ; l’homme, tombé à cause du péché, et racheté moyennant la grâce. Le dogme a été la base de l’intolérance religieuse, puisque toute vérité philosophique ou scientifique trouva dans le dogme intangible sa pierre d’achoppement. La vérité étant unique, aucune autre vérité n’est admise. Donc, l’Église dit :

« Je suis en possession de la vérité, qui n’est pas avec moi est dans l’erreur. »

Combien de bûchers allumés, combien de sang a fait verser la présomption de l’Église, qui, en définitive, n’était que la présomption des prêtres installés sur les dogmes pour guetter toute lumière de vérité nouvelle, afin de l’éteindre ! Au dogmatisme ecclésiastique s’unit le dogmatisme scientifique pendant des siècles. A tel point que saint Thomas, les Conciles, le Pape, infaillibles, eurent comme complice involontaire Aristote, dont les œuvres étaient considérées comme les colonnes d’Hercule du savoir et de la pensée. Avec la réforme de la méthode scientifique, avec l’hérésie religieuse et la critique philosophique, le dogmatisme se confina dans l’Église. Puis vint à s’affaiblir l’éclat de l’anathème, qui pendant des siècles avait été la foudre de Rome.

Le positivisme en philosophie, l’expérimentalisme en science ont affranchi la pensée des dogmes religieux et scientifiques. Aujourd’hui, l’homme cultivé ne veut plus croire en aveugle, il demande des explications et il cherche des preuves. Le modernisme est entré dans le corps de l’Église, cheval de Troie du rationalisme.

L’histoire de la pensée est l’histoire du dogme et du libre examen en lutte. Et l’histoire nous montre combien de fois le premier étouffa le second en retardant la civilisation.

Après Kant, le dogmatisme a perdu sa bataille.

Allons-nous vers le triomphe de la raison ? Certains courants philosophiques fatigués et les restaurations cléricales imposées par les gouvernements réactionnaires en certaines nations nous laisseraient redouter un nouveau Moyen-âge, s’il n’y avait pas des courants de pensée vifs et riches dans les pays libres, et s’il n’y avait pas beaucoup d’hommes qui ne cessent de lutter contre la tyrannie. Mais s’il est naturel d’espérer en demain, certains que le patrimoine de la pensée ne peut subir les catastrophes des systèmes politiques, nous ne devons pas ignorer combien il est nécessaire d’intensifier la lutte contre le dogmatisme. Le bolchevisme en Russie, la tyrannie jésuitique fasciste en Italie, la dictature clérico-militaire en Espagne sont la preuve que la civilisation ne va pas du même pas que le progrès. Le dogme est là, protéiforme et tenace. Il est là, mais il est en nous aussi. »

- C. B.
 

BIBLIOGRAPHIE :

Le Moy. — Dogme et critique, 1903.
Ch. Guignebert. — L’évolution des dogmes, 1910.
Laberthonnier. — Le dogmatisme moral et « Essais de philosophie religieuse, 1903.


L’Encyclopédie anarchiste est une encyclopédie initiée par Sébastien Faure, entre 1925 et 1934, publiée en quatre volumes.
 

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