★ LE COMMUNISME-ANARCHISTE

Publié le par Socialisme libertaire

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★ Pierre RAMUS : 
Le Communisme-anarchiste comme réalisation pour les temps actuels (1934) 

 

Au Lecteur, 

Nous estimons que la diffusion des principes libertaires, que le libre examen et la juste critique de ce qui est autour de nous ne peuvent que favoriser le développement intégral de ceux qui nous liront.

Montrer combien l’autorité est irrationnelle et immorale, la combattre sous toutes ses formes, lutter contre les préjugés, faire penser. Permettre aux hommes de s’affranchir eux-mêmes d’abord, des autres ensuite ; faire que ceux qui s’ignorent naissent à nouveau, préparer pour tous, ce qui est déjà possible pour les quelques-uns que nous sommes, une société harmonieuse d’hommes conscients, prélude d’un monde de liberté et d’amour.

Voilà notre œuvre : elle sera l’œuvre de tous si tous veulent, animés de l’esprit de vérité et de justice, marcher à la conquête, d’un meilleur devenir [...]

En condamnant Pierre Ramus à 14 mois d’emprisonnement pour sa propagande pratique en faveur de la vasectomie, nouveau procédé de stérilisation employé en Autriche depuis quatre ans, le gouvernement autrichien savait ce qu’il faisait : il a voulu frapper en Pierre Ramus l’homme qui depuis trente-cinq ans se dévoue sans compter pour la diffusion de l’anarchisme et de l'antimilitarisme.

Encore étudiant, Pierre Ramus (Rudolf Grossmann) fut banni du territoire austro-hongrois et dût se réfugier en Angleterre, puis en Amérique. En 1907, il participait au Congrès socialiste de Stuttgart, où, aux côtés de Karl Liebknecht, il se montra un irréductible partisan du principe de la grève générale internationale en cas de mobilisation. Il rédige une revue « La Nouvelle Génération » (Neue Generation), puis un périodique « Le Bien être pour tous » (Wohlstand fuer Alle). La guerre éclate. Pour le punir d’être demeuré fidèle à ses principes communistes-anarchistes et antimilitaristes, on l’emprisonne, puis on l’interne dans un camp de concentration, et il faut la révolution de 1918 pour l’en tirer. Libéré, Pierre Ramus se lance à nouveau dans la bataille, avec son groupe « l’Union des socialistes sans autorité » (Bund Herrschaftloser Sozialisten) et son hebdomadaire « Connaissance et Libération » (Erkenntniss und Befreiung), auquel il rallie Sigismond Freud, Franz Kobler, Johannes Ude, Franz Frankl et Max Nettlau. Il vit les jours sombres au cours desquels la révolution est écrasée à Buda-Pest, à Munich, à Vienne ; Rosa Luxembourg, Karl Liebknecht et Gustav Landauer sont assassinés, en compagnie de centaines de travailleurs.

Mais cela ne décourage pas Pierre Ramus. Il poursuit sa propagande écrite et verbale, car c’est un excellent orateur. Mais il n’est pas que cela : il est un esprit cultivé, un écrivain et un théoricien ; admirateur de Kropotkine et de Tolstoï, il a donné de bonnes traductions en allemand de ces deux doctrinaires. Dans sa « Recréation de la Société à portée du Socialisme » (Die Neuchöpfung der Gesellschaft im Bereich der Sozialismus), dans sa « Fausse doctrine du Marxisme (Irrlehre des Marxismus), Pierre Ramus a précisé son point de vue sociologique et la présente brochure en est un très rapide, trop rapide résumé, Pierre Ramus a également décrit, dans son « Combattant pour la paix de l’arrière » (Friedenskrieger des Hinterlandes) les persécutions, tortures, fusillades, assommades et autres sévices dont furent victimes, dans les ergastules habsbourgeois, ceux qui refusèrent de se laisser mobiliser pendant la guerre mondiale. Il faut espérer qu’à sa sortie de prison, Pierre Ramus pourra reprendre son activité et, à ce sujet, il convient de rappeler que l’auteur de la brochure qui va suivre n’a jamais séparé la transformation de la société de la transformation de l’individu. Pas de société nouvelle sans hommes nouveaux, dans leurs pensées et leurs actions. Pas de révolution au dehors sans une révolution au-dedans.

 1er Août 1934

E. ARMAND
 

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L’Anarchisme, comme réalisation pour les temps actuels 

Dans le chaos, l’inconstance et l’incertitude actuels de tous les facteurs économiques de la vie sociale, état de choses admis par les classes dominantes, la finance et les gouvernements de tous les pays ; dans ces temps troubles, nous avons la grande consolation, nous autres anarchistes, de constater que la théorie anarchiste-communiste a dépassé le stade d’une réalisation future pour devenir une théorie économico-sociale réalisable pratiquement à notre époque et actuellement. C’est là la grande évolution de l’anarchisme au cours des dernières années, évolution et développement accomplis au cours des évènements qui se déroulent sous nos yeux. Quelques-uns s’en insoucient, d’autres les mésestiment, mais ils n’en existent pas moins et il faudra qu’on compte avec eux.

En tant qu’anarchistes, nous avons le devoir d’examiner et de scruter toutes les formes de vie sociale en relation avec l’anarchisme ; il faut vivre avec notre temps, ses théories et ses doctrines, pour nous rendre compte si l’anarchisme n’est pas resté en arrière et s’il peut suivre les résultats nouveaux enregistrés par la science et l’expérience. Les recherches historiques ne nous seront d’aucun aide, car la vie présente nous pose de nouveaux problèmes.

A côté de ses ennemis déclarés, l’anarchisme compte encore des adversaires, qui ne le croient pas actuel et le jugent impraticable pour le passage révolutionnaire de l’état de choses présent à la société libertaire. Il faut, disent-ils, un état de transition ; durant cette période il faudra que les hommes se contentent d’être salariés d’après leur travail ou de recevoir un salaire égal pour leur travail. Ces adversaires doutent qu’il y ait assez de produits pour tous au moment de la révolution sociale ; ils croient nécessaire un système de distribution qui ne pourra assurer qu’une vie très modeste. La construction au cours et après la révolution sociale leur apparaît comme un procès très long, et ils craignent que les hommes travaillent peu et consomment trop. La critique « syndicaliste » dit : « bientôt ce serait la misère ; les plus forts se satisferaient, tandis que les faibles auraient faim ; le nouveau régime serait discrédité et la réaction autoritaire se donnerait sans tarder libre cours ».

Pour atteindre cette situation, point n’est besoin de révolution : c’est l’état de choses d’aujourd’hui. Pareille critique oublie totalement que le manque actuel de produits est le résultat voulu du système capitaliste, monopolisateur, mais n’est nullement obligatoire avec notre développement technique. C’est le bolchevisme qui justifie sa dictature par cette théorie. Mais comment peut-on nier l’anarchisme en se servant d’arguments marxistes-bolchevistes ?

Ce sont les Lénine, les Trotzky, les Boukharine qui depuis 1917-1922, et aujourd’hui même, veulent nous faire croire que : « Du travail, de la discipline, des sacrifices plus grands qu’en régime capitaliste sont nécessaire pour édifier la société nouvelle. » C’est la même explication que donne la méthode de Staline pour justifier la déplorable situation des ouvriers en Russie.

Les anarchistes qui sont du même avis, devraient aller jusqu’au bout de leur pensée et dire que l’autorité est nécessaire dans telles ou telles conditions et qu’il faut abandonner le principe de l’anarchisme pendant quelque temps, au moins durant la période de transition ; et que l’anarchisme n’est qu’une chose d’un avenir lointain à réaliser après la révolution. C’est la théorie marxiste de Lénine. Il faut y adhérer si l’on est d’opinion que le communisme libertaire n’est pas apte à constituer la première phase d’un libre développement de la société.

Heureusement le communisme anarchiste peut sans difficultés réfuter ces objections, car elles sont fausses. Mais on peut se faire une idée des difficultés que l’anarchisme doit combattre, alors que toutes les autres, théories de réorganisation sociale ont fait faillite. Une foule de tendances sociales démontrent qu’il faut se concentrer sur l’anarchisme, ce qui n’empêche pas qu’on s’efforce de trouver des objections, qui d’ailleurs, sont depuis longtemps réfutées. Il est dommage que nos critiques n’aient rien de mieux à nous opposer que nos ennemis. Je ne vois qu’une différence entre les uns et les autres : nos ennemis ne veulent pas que nous progressions et nous empêchent sciemment d’avancer ; nos critiques rendent notre marche plus pénible, mais pour la plupart sans le vouloir,

Pierre Kropotkine et l’anarchisme communiste 

Comme Kropotkine est le théoricien le plus important de l’anarchisme communiste, il importe d’examiner à nouveau ses théories. C’est d’autant plus important qu’on a osé prétendre que Kropotkine avait changé d’opinion durant les dernières années de sa vie, surtout en ce qui concerne la période transitoire de la révolution sociale.

Rien n’est plus faux.

Ceux qui émettent pareille assertion se basent surtout sur le dernier chapitre des « Paroles d’un Révolté », écrit le 5 décembre 1919, figurant dans l’édition russe. Mais ce chapitre ne justifie en aucune façon l’imputation faite à Kropotkine d’un changement dans ses idées.

Kropotkine l’écrivit dans un temps et dans un pays où il avait l’occasion de se rendre exactement compte de l’impuissance de la construction marxiste-gouvernementale. Mais en même temps force lui était de prendre de grandes précautions, s’il ne voulait pas se faire poursuivre et tout à fait supprimer. C’est pourquoi il ne mentionne pas une seule fois le bolchévisme, alors qu’il vivait en Russie, sous sa dictature, et certainement tout ce qu’il écrit se rapporte incontestablement à lui. Dans le chapitre dont s’agit, Kropotkine démontre l’incapacité absolue du bolchévisme et du marxisme à accomplir une révolution sociale et il y réfute aussi cette constatation absurde du marxisme, que le capitalisme conduit à une « superproduction » et qu’un gouvernement marxiste, avant le pouvoir total, suffirait à donner aux prolétaires toutes les conditions nécessaires de vivre. Kropotkine démontre qu’une révolution marxiste conduit à une misère pire que celle produite par le capitalisme, car la bureaucratie qui le dirige est incapable d’organiser la société d’après les principes de la liberté et de la libre consommation. Ce qu’une révolution anarchiste, qui se poursuivra sous d’autres formes, pourra faire Kropotkine l’explique :

« Il n’y a qu’un seul moyen pour éviter la famine. Il nous faut concevoir, que dès le commencement de la période révolutionnaire dans un pays, il n’y a qu’une seule méthode raisonnable : il faut que les ouvriers, les paysans et tous les autres, dès le début, s’emparent des fabriques, des usines, des champs, qu’ils saisissent toute l’économie du pays dans leurs propres mains, qu’ils s’organisent et se dirigent eux-mêmes et qu’ils emploient leurs efforts à une augmentation de toute la production du pays. Mais ils comprendront seulement cette nécessité, si tous les soucis communs sont exposés d’une façon simple devant chaque village, chaque ville, chaque fabrique et chaque usine comme leur propre affaire, qu’on le leur laissera exclusivement le soin de régler, au lieu d’en charger, comme aujourd’hui, grâce à nos anciennes habitudes, des ministres et des comités. »

On voit que Kropotkine a démontré les insuffisances d’une révolution marxistes. Kropotkine ne nie aucunement l’anarchisme ; au contraire, il nous montre dans ce chapitre quel est notre devoir en tant qu’anarchistes, pour mettre la classe ouvrière en état d’accomplir une révolution dans l’esprit de l’anarchisme :

« L’étude de la vie pratique des peuples nous porte à la conclusion que tous les peuples doivent s’efforcer d’atteindre un grand progrès et d’arriver à un grand perfectionnement de l’agriculture, afin de pouvoir en même temps que l’agriculture, intensifier l’industrie textile. Nous ne voulons pas de peuples qui soient destinés à servir les autres. La notion de ce fait et celui qu’il est impossible d’accomplir une révolution sociale grâce à une dictature, constituent les fondations du bâtiment entier. Sans cette notion on bâtit sur du sable. »

Mais il est impossible d’accomplir une pareille révolution par la dictature et le pouvoir gouvernemental. Sans une reconstruction accomplie par les ouvriers et les paysans eux-mêmes, la révolution sociale échouera ! La révolution russe l’a démontré de nouveau et il faut espérer qu’on comprendra cette leçon : qu’on fasse partout, en Europe et en Amérique, des expériences sérieuses pour créer au sein de la classe ouvrière — au milieu des ouvriers, des paysans et des intellectuels — des esquisses de la révolution future, en désobéissant aux ordres d’en haut, mais en se mettant en état d’élaborer les formes libres d’une vie économique tout à fait nouvelle. »

Je ne puis voir dans ces mots de Kropotkine une négation de l’anarchisme. Ils montrent les principales conditions nécessaires pour une révolution sociale à tendances anarchiste.

Mais il y a du nouveau dans ce chapitre, que les critiques de l’anarchisme ne semblent pas apercevoir : Kropotkine y met fin aux vieilles conceptions d’une révolution militaire violente ; on y trouve, au lieu d’elles, la reconstruction économique de la vie, telle que je me suis efforcé de les indiquer dans ma « Reconstruction de la Société ».

Des révolutions de 1917 et des suivantes, en Autriche et en Allemagne, Kropotkine a tiré comme nous cette grande leçon :

La révolution sociale des peuples est inutile et échoue si elle n’aboutit pas à l’anarchisme.

Qu’est-ce que c’est l’anarchisme et que promet-il ?     

L’anarchisme a revendiqué pour la première fois la liberté et l’indépendance économiques conjointement à la liberté politique. Les révolutions sociales et surtout la Déclaration des droits de l’homme en France (1789) ont beaucoup éclairé les esprits en ce qui concerne la liberté individuelle, mais la liberté économique est restée négligée. Les fondateurs de l’anarchisme ont eu la hardiesse de démontrer qu’il n’existe pas de liberté individuelle sans la liberté économique. L’anarchisme a nié l’autorité non seulement dans le domaine politique, mais aussi dans celui de l’économie. Le résultat de cette négation a été l’idée libératrice de l’anarchisme.

L’anarchisme nie l’autorité dans le domaine politique et économique.

Naturellement, l’anarchisme postule le droit à la consommation libre, le droit de disposer de son travail et d’en user à liberté. Actuellement, seul le riche a ce droit. En faire un droit pour tous, voilà ce qu’enseigne l’anarchisme. C’est justement la proclamation de ce droit qui a suscité les pires calomnies contre l’anarchisme et de la proviennent la plupart des malentendus dont il est l’objet.

On prétend que chacun voudra avoir les produits les plus luxueux et les plus précieux, et qu’on ne travaillera plus. C’est ridicule, et nous savons que les riches capitalistes ne sont pas tous des fainéants. Ce sont des exploiteurs, mais la classe bourgeoise ne pourrait pas maintenir son pouvoir, si la richesse avait la paresse comme conséquence inéluctable nécessaire. Quiconque lit les biographies des riches industriels s’aperçoit qu’il est absurde de croire que la liberté dans le domaine économique conduit à la fainéantise. Rien ne donne mieux le courage de travailler pour soi-même et pour son propre bien-être que l’application et la mesure.

D’ailleurs l’anarchisme ne proclame nulle part le droit à la libre consommation dans tous les domaines économiques. Il revendique seulement le droit de chaque homme à tout ce qui lui est nécessaire et à tout ce qui lui convient d’après la raison et nos possibilités.

La question qui se pose pourtant encore quelquefois est celle-ci : « Comment le communisme est-il possible s’il y a manque de produits ? D’où l’abondance dans la production peut-elle sortir, étant donné le peu de consommation des masses jusqu’à la révolution ? »

Voici la réponse : La consommation restreinte des masses d’aujourd’hui ne peut servir de mesure pour les possibilités de la production. Aujourd’hui on ne produit que pour les riches, pour ceux qui peuvent payer ; il y a peu de produits. Il suffirait de mettre les chômeurs à la production et il en résulterait déjà une telle abondance de produits qu’il serait impossible de maintenir le profit. capitaliste, les prix et l’intérêt. Le capitalisme préfère payer les chômeurs à les faire travailler. Les capitalistes comprennent mieux que nos critiques la force productive des ouvriers.

8 à 10 millions de chômeurs en Europe [1]     

En Allemagne on compte bon an mal an 2 millions de chômeurs ; en Autriche, sur 3 ou 4 ouvriers, il s’en trouve 1 sans travail ou en demi-chômage. Si nous versons cette force productrice dans la production, le résultat suffit déjà à garantir un standard de vie moyen.

Il faut encore considérer une chose importante : avant la révolution doit commencer déjà un procès de déplacement des forces productrices, c’est-à-dire qu’il faut mettre fin à la plus grande partie de l’industrie de luxe. Dans le chapitre ci-dessus mentionné, Kropotkine attire bien l’attention sur ce fait.

Ce déplacement de la force productrice, le travail de ceux qui chômaient jusqu’à la révolution, l’union des chômeurs industriels avec les paysans, l’envoi des chômeurs dans les villages et à la campagne, tout cela assure une telle augmentation des produits, que l’existence de l’anarchisme est assurée. La période de transition doit être achevée après une seule récolte, sinon la révolution sociale a échoué.

Il est du devoir de la propagande anarchiste, avant la révolution, d’établir un plan exact de travail en vue de promouvoir l’action. Ce plan doit être bien établi, il ne faut pas d’expériences stériles. La révolution accomplie, le droit à la libre expérimentation est garanti, mais la période d’action ne supporte pas d’expériences. Je crois nécessaire d’attirer l’attention de tous, y compris les femmes, sur ce fait, qu’il sera nécessaire pour tous, au commencement de la révolution, de participer au travail agricole. Cela encore, je l’ai démontré exactement dans ma « Reconstruction de la Société ». Le chapitre précité de Kropotkine, dont j’ai eu connaissance en 1927 seulement, insiste également là-dessus.

Dans les autres pays de l’Europe la situation est presque la même que dans les pays germaniques ; partout, il faut consacrer toutes les forces productrices aux produits nécessaires et, dans ce domaine, il faut proclamer le droit à la libre consommation ; ainsi se formera un renouvellement anarchiste de la vie et de la société.

Ce renouvellement étaye sa base économique sur les paroles de John Jacob Roskob : « Si les grands établissements et fabriques actuelles voulaient employer toutes leurs possibilités de production, elles produiraient en 6 mois ce que les consommateurs peuvent utiliser en 12. »

Si la nature, la terre et l’humanité étaient trop pauvres, l’anarchisme ne serait pas possible ; la libération sociale serait un leurre. C’est pourquoi la chose principale est de savoir à quoi nous en tenir sur les possibilités économiques de la révolution sociale. Il faut que nos résultats se basent sur les faits que la science moderne nous fournit. Cette étude nous encouragera, car les résultats de la vie et de la technique sont absolument en notre faveur.

La surface de la terre et la vie humaine          

J’entends prouver qu’on peut avoir une surabondance de produits pour tout le monde dans l’industrie et dans l’agriculture, grâce à la chimie ; il faut seulement se libérer du monopole et de l’autorité.

On a prétendu que la production du sol d’un pays ne peut être comparée aux produits de l’industrie, car la superficie du sol ne peut pas être augmentée et les différences dans la qualité de la production sont trop grandes pour pouvoir garantir l’existence d’une société anarchiste. Le sol est dans chaque pays en quantité et qualité limitées et il faudrait être sûr avant toute autre chose que l’individu en récolte les fruits d’après son travail. Mais les recherches de la science nous conduisent à d’autres résultats en qui concerne l’agriculture.

Elles démontrent que le sol se trouve dans chaque pays en abondance. D’après les recherches du professeur Schanz, de l’Académie Américaine des Sciences, chaque pays possède assez de sol arable pour nourrir une population cinq fois plus grande que celle qu’il compte présentement. Cela veut dire, que la terre pourrait avoir une population de 8 à 9 milliards d’habitants, sans aucune crainte de famine. Il s’ensuit que la productivité de la terre est si grande, que le sol, une fois libéré du monopole, il deviendra le moyen de production le plus abondant, garantissant à la société libertaire les subsistances en abondance.

Le sol ne fait donc pas défaut.

Le prodige de l’agriculture : la productivité s’augmente à mesure
que diminue la surface cultivable nécessaire 

Tandis qu’il y a encore des gens qui se cassent la tête dans la crainte que soit impossible le droit de consommer au gré de l’individu, les recherches de la science et de l’agriculture réduisent à néant ces doutes. Les estimations du professeur Schanz sont même déjà dépassées et mettent l’humanité devant une nouvelle situation, qui garantit la possibilité de réalisation de l’anarchisme.

Dès 1920, l’agriculture américaine se fait d’après de nouvelles règles :

1° On emploie des méthodes scientifiques qui permettent de transformer le sol non cultivable en sol fertile.

2° On emploie des machines qui évitent de plus en plus le travail de l’homme.

3° Il en résulte une diminution du temps de travail.

L’usage de ces méthodes dans les années 1922-1926 ont eu comme conséquence une augmentation de la productivité qui surpasse la production de 1900 de 40 %. Mais le fait le plus important est ceci : cette augmentation énorme se produit sur un terrain énormément diminué quant à la surface.

Les conséquences de ces nouvelles méthodes sont caractérisées par les paroles suivantes du professeur L. E. Call, membre de l’Institut, pour des expériences agricoles, à Kansas, qui écrivait le 18 janvier 1929 dans la revue « Science » :

« La productivité de l’agriculture américaine s’est augmentée de degré en degré ; le problème est maintenant d’éviter une surproduction de produits agricoles. C’est le problème national le plus important… »

L’emploi de ces méthodes d’une production croissante sera le principal devoir d’une révolution sociale.


La productivité actuelle de l’agriculture 

 
Il n’est plus nécessaire d’inventer d’autres machines qui économisent davantage le travail humain pour rendre l’anarchisme réalisable tout de suite après la révolution sociale. Le fait est qu’il existe dès maintenant tout ce qu’il faut. Que la révolution se limite à assurer chacun la liberté du travail et la liberté de consommation par l’accès à tous les moyens de production, cela suffit. La suite résultera du procès normal du travail — pour la période de transition, une journée de travail de 3 à 4 heures suffira pleinement. Quel est celui ou celle, pourvu qu’il soit doué d’une mentalité saine, qui ne travaillera pas avec plaisir ce petit nombre d’heures quotidien, alors qu’il possèdera en échange le droit de libre consommation ?

Le Dr. O. E. Baker, économe agricole du Ministère de l’Agriculture aux États-Unis, a fait une conférence devant les membres de la Société Sociologique des États-Unis, où il a montré quelles immenses transformations économiques on peut faire en très peu de temps. Cet expert dit, entre autres :

« La production agricole s’est élevée à 14 % de plus au cours de la période 1922-1926 qu’au cours de celle 1917-1921. Dans le même temps, la population s’est augmentée seulement de 9 %, ce qui veut dire que l’augmentation dans la production agricole a été 50 % plus grande que celle de la population. Encore plus étonnant est-il que cette augmentation rapide de la production sait parallèle à la diminution de la surface du terrain utilisé. Les documents du gouvernement indiquent une diminution de 13 millions d’acres en 1925, par comparaison avec le terrain utilisé en 1919-1924. C’est la première diminution enregistrée dans notre histoire nationale. On peut compter sur une diminution de 1 million d’acres par an. »

Tout cela démontre combien il est insensé de dire que l’anarchisme fera faillite à cause des difficultés économiques. Ou que les possibilités économiques manqueront dans la période de transition.

Pour donner une idée de la force productrice qui sera libérée par la révolution sociale, je citerai encore un extrait du Bulletin du Ministère de l’Agriculture des États-Unis (1928, Bull, Nº 1348) :

« Il y a 75 ans, la plupart des travaux agricoles d’une ferme devaient être faits par le travail humain, assisté au plus d’un ou deux chevaux. À cette époque, un ouvrier agricole moyen pouvait cultiver 12 acres de sol. Aujourd’hui, avec les machines agricoles modernes, le même ouvrier peut en cultiver 34 acres, soit une productivité augmentée de 300 %. Dans les exploitations agricoles les plus importantes, où on emploie des moteurs très robustes, le même ouvrier cultive 100 acres. Il y a même de ces grosses fermes, où un seul ouvrier peut cultiver 300 acres, alors qu’il y a 75 ans, il fallait 25 ouvriers ! »

Cela démontre à quel point l’exploitation du capitalisme s’est augmentée et qu’il est impossible de le combattre par les moyens d’ordre parlementaire on seulement syndical. Mais cela démontre aussi les possibilités économiques de la production moderne et qu’il suffit de briser les chaines du monopole. Ceci fait, l’anarchisme communiste pourra facilement garantir à tout être humain une table bien garnie.   
 

Possibilités internationales de l’utilisation des moyens techniques modernes  
 

On pourrait objecter que l’ai rendu ma tâche trop facile en prenant comme exemple un pays comme les États-Unis, tellement développé au point de vue technique, beaucoup plus développé que le sont les pays d’Europe. Je n’accepte pas cette objection, car elle n’est pas exacte. Pour résoudre la question « si l’anarchisme peut être réalisé et pratiqué à notre époque », il suffit d’en démontrer les possibilités réelles, c’est-à-dire, : pour notre temps et pour notre génération.

Il est évident que ces moyens de production étant déjà employés en Amérique, rien n’empêchera les peuples, libérés de l’autorité et du monopole, de les utiliser également chez eux. Pour cette utilisation, nous n’avons pas besoin d’une période de transition ; un plan de production est seul nécessaire.

Pour montrer combien peut être courte la période de transition menant à l’anarchisme, je citerai encore un exemple, également d’une grande valeur, parce qu’il a trait au problème de l’éducation des enfants dans une société libre.

Le professeur E. O. Baker fit décembre 1927, à Washington, une conférence à la Société Sociologique américaine. Il parla sur « La population, le ravitaillement et l’agriculture américaine ». Il y exposa que l’agriculture scientifique moderne tend à remplacer la vieille génération des fermiers par des paysans, sachant travailler avec les instruments scientifiques d’aujourd’hui. Pour atteindre ce but, on engage les fils et les files des fermiers à suivre des cours pratiques d’agriculture alors qu’ils sont encore à l’école. Le résultat de cet essai d’éducation était merveilleux, à en croire Baker.

« Dans une seule année nous avons réussi, grâce à nos cours éducatifs pour les jeunes garçons et les jeunes filles des paysans, à instruire une armée de 600.000 jeunes gens dans les méthodes d’agriculture les plus modernes et les plus avancées. »

D’ailleurs il est faux de croire que l’Amérique seule possède les conditions économiques et techniques voulues pour garantir à la société une vie abondante dans l’anarchisme. J’ai un gros livre sous les yeux, intitulé « La culture par l’électricité », dont l’auteur est le directeur de la Société d’Électricité en Suède, et il démontre dans son livre les énormes avantages que l’agriculture de son pays septentrional a retiré de l’usage de l’électricité, conquise sur l’eau, employée pour chauffer le sol. Des expériences ont été faites dans les régions les plus glacées de la Suède. Les résultats sont incroyables. Grâce au chauffage électrique du sol on peut cultiver et faire la récolte 10 mois dans l’année. Et les mères de famille de Suède peuvent acheter à Noël des légumes provenant de l’extrême nord de leur pays.

J’ose affirmer que l’emploi combiné de la culture sur couches et sous châssis — qu’on peut employer partout — peut solutionner avec abondance la question économique de l’humanité ; il ne faudra même pas utiliser toutes les possibilités de la production agricole ; au contraire, il faudra les limiter, car il y aura abondance de produits pour satisfaire aux demandes les plus larges.

Il est vrai que la propagande en faveur de l’anarchisme est plus difficile que toute autre. Mais elle a l’avantage d’être juste, vraie et incontestable, ce qu’on ne peut pas dire d’aucun autre mouvement social.

Nous n’avons pas besoin d’un « énorme appareil de production »,
d’une « immense reconstruction de la production » 
  

   
Il est facile de rendre un problème insoluble en le compliquant. C’est la tâche de ceux qui croient que la révolution sociale trouvera un appareil de production qu’elle devra reconstruire du tout au tout, pour pouvoir le faire servir à une société libertaire.

En vérité, il n’y a pas d’économie centraliste, il existe seulement une exploitation centraliste des moyens de production par les classes privilégiées. En détruisant ces privilèges, par la révolution sociale, l’économie fonctionnera de façon autonome et décentralisée, comme elle le fait, même aujourd’hui. Le passage du capitalisme à l’anarchisme n’est pas si difficile qu’il semble du point de vue économique, car ce passage ne touche pas à l’économie, mais elle le libère seulement de ses obstacles et ses chaînes. Ce serait une grande faute d’empiéter arbitrairement sur l’économie et la production ; les reconstructions. nécessaires se feront facilement et librement par les experts, les techniciens de la production.

D’ailleurs le système actuel tend déjà à une décentralisation — pour l’accomplir, il ne manque que la révolution sociale.

Le facteur le plus important de la révolution se trouve dans l’agriculture. Le plus beau programme socialiste industriel ne vaut rien, s’il est en contradiction avec les bases de l’agriculture. Or, dans ce domaine, l’anarchisme repose sur une fondation absolument solide.

Nous pouvons observer un procès de transformation de l’agriculture, qui est en faveur des petites exploitations agricoles. On a enfin reconnu que l’exploitation du sol est plus efficace sur un petit terrain, si l’on possède tous les moyens techniques voulus, La question a été résolue dans le sens de l’anarchisme, qui considère la décentralisation. comme nécessaire au bonheur de l’humanité.

Nous trouvons ces résultats dans une brochure intitulée « La surface du sol et la production dans l’Agriculture » (Voir Zeitschrift für Agrarpolitik und internationale Landwirtschaft, Neue Folge, B. VI, Heft 3, Berlin 1927), dont l’auteur est l’agronome Otto Karutz. Il a fait une comparaison entre une exploitation centralisée et une exploitation en petit. I met en paralléle le district de Stralsund en Allemagne comme exemple d’une production centralisée, et la province Malmöshülän au sud de la Suède. Les deux régions sont géologiquement et, en ce qui concerne le climat, tout à fait semblables, mais la façon de produire diffère absolument. On a comparer les récoltes de 1910 à 1922.

Le résultat est tout à fait négatif pour les partisans de la production centralisée. (J’espère que les marxistes et les bolchévistes liront ces lignes !) La province de Malmöshülän a surpassé le district de Stralsund de 23 à 69 % !

Ce fait est très important pour notre étude. Il convainc, plus que des paroles le pourraient faire, que l’autonomie et la décentralisation sont également dans l’ordre économique la seule manière raisonnable de concevoir la production et la société.

Des semblables exemples de décentralisation peuvent se trouver également dans l’industrie, là où l’électricité est de plus en plus utilisée. La décentralisation ne peut subsister que dans l’anarchisme.

La révélation du mystère  
 

Nous pouvons aujourd’hui déclarer que Malthus est dépassé, que les subsistances croissent plus vite que les hommes !

La restriction des naissances est le droit pour la femme de vivre sa propre vie ; elle est une mesure de raison, d’éthique, une question individuelle, mais elle n’est plus une nécessité économique.

Un facteur est intervenu qui, ces dernières années, a placé l’humanité dans une situation économique tellement favorable, que l’anarchisme-communiste peut garantir une abondance merveilleuse dans la production. Cette merveille peut se produire par l’utilisation de l’azote artificiel.

Les difficultés que présentaient l’obtention de l’engrais minéral ont été surmontées par l’extraction directe de l’azote de l’air, c’est-à-dire par la transformation du lignite et de l’air, procédé qui peut être employé partout. Grâce à l’invention de l’azote artificiel il n’existe plus de sol stérile, car tout terrain peut être rendu excessivement fertile.

L’anarchisme-communiste dit : « Chacun travaille comme il le peut, chacun prend d’après ses besoins ! » Faut-il renoncer à cette doctrine alors que le Ministère américain de l’Agriculture déclarait le 1er janvier 1927, que sur une population de 119 millions d’habitants, il suffit que 24 % soient occupés à des travaux agricoles pour les nourrir tous ?

Le progrès technique lui-même nous appelle à nous révolter et à nous rebeller contre tous ceux qui veulent à nouveau étrangler la révolution sociale dans un bureaucratisme étouffant et des lois restrictives.

À notre époque, où l’on peut dire pour la première fois qu’il n’y aura bientôt plus d’excès de population et où le sol ne manque plus, dans les temps actuels, nous pouvons crier à haute voix à l’humanité :

La Révolution Sociale t’attend pour te mener dans l’heureuse abondance de l’anarchisme-communiste.

Ce que la chimie peut pour l’agriculture et l’industrie  
 

Pour mieux illustrer ce que j’avance, voici quelques exemples et preuves :

Pendant la guerre on considérait une tonne d’azote comme équivalant à 20 tonnes de seigle.

Dans le « Magazin der Wirtschaft » (1928), un savant, D. Baade, exposait que ce chiffre est de beaucoup dépassé D’après lui, si, sur 1 hectare de terre, l’on emploie 32 kilos d’azote, cette quantité rapporte 170 % ; si l’on y ajoute encore 12 kilos, la quantité s’accroit de 247 %. Seules, les conditions météorologiques imposent une limite à l’augmentation de la production [2].

Encore une invention chimique nouvelle : la chimie du bois. Friedrich Bergius expose dans son œuvre « Sciences naturelles, Technique et Politique » (1927), un procédé étonnant, grâce auquel le bois peut constituer la matière première pour toute une industrie nouvelle. D’après Willstätter, cette invention donne la possibilité d’extraire du bois sec 60 % d’hydrate de carbone.

L’emploi de l’azote artificiel comme engrais semble aussi augmenter la valeur nutritive des pâturages. L’agronome Baker écrivait dans le journal Science (18 janvier 1928), qu’en Amérique une augmentation de 4 % dans le nombre des vaches avait eu comme résultat un accroissement de 20 % dans le rapport du lait.

On peut dire à juste titre : Les quatre générations qui ont suivi 1789 ont acquis davantage pour l’humanité, en ce qui concerne les moyens de production et les sources de richesse, que les 57 générations qui se sont succédé depuis Jésus-Christ. Or, toutes ces augmentations dans la productivité sont autant de possibilités accrues pour l’évolution libératrice qui aboutit à l’anarchisme-communiste.

Le complot international des gouvernements et du capitalisme          
                

Grâce à toutes ces inventions, existe la possibilité d’une abondance merveilleuse — l’anarchisme-communiste est devenu la base de toute théorie d’une révolution sociale, du moins si elle tend réellement à la libération du prolétariat.

Malheureusement il y a un grand obstacle à toutes ces possibilités : les pouvoirs dominants les connaissent et elles ont tout fait pour empêcher l’humanité de s’en servir.

Pendant que les gouvernants font tout ce qu’ils peuvent pour tenir les peuples dans une excitation constante, afin de maintenir l’esprit guerrier ; pendant que les hommes d’État parlent de « différends insurmontables » entre les gouvernements ; pendant que le marxisme appelle les peuples à se tenir prêts pour la guerre « défensive » — pendant tout ce temps, les gouvernements ont formé une ligue absolument internationale : le Trust mondial pour la fabrication de l’azote. Et les différends entre les gouvernements sont si peu réels (il n’y a que les peuples que l’on excite les uns contre les autres) qu’ils ont convenu de faire de l’Allemagne le centre de l’industrie de l’azote. L’Allemagne est à la tête de la production de l’azote, plus de la moitié de ce qui s’en utilise dans le monde est produite en Allemagne à destination de tous les pays. La J. G. Farbenindustrie est le plus grand producteur d’azote. Il y a aussi le Klöckner-Konzern, connu sous le nom de « Hibernia », qui produit l’azote par un procédé différent. Les deux firmes sont en relations avec les capitalismes anglais, français, norvégien, américain et japonais.

C’est pourquoi il n’y a pas de concurrence dans l’industrie de l’azote). Elle est sous la dépendance absolue des gouvernements. Une preuve en est fournie par une dépêche publiée dans la presse industrielle spéciale, annonçant que le gouvernement américain avait confié à la J. G. Farbenindustrie la construction et l’exploitation d’une usine pour la production de l’azote, usine située dans l’État de la Louisiane. Il est évident que tout cela se passe selon des conventions internationales.

L’humanité se trouve devant un complot des gouvernements et du capitalisme.

Le principal facteur révolutionnaire économique dans la révolution sociale        

                                  
La plus grande partie de la production de l’azote n’est pas employée dans l’agriculture, mais dans l’industrie guerrière (la Russie bolchéviste y compris).

Ce merveilleux moyen pour assurer la vie et la liberté des peuples, est employé par les gouvernements pour préparer la mort et l’anéantissement des masses prolétaires. Nulle part ailleurs, le principe de l’autorité ne se montre davantage ennemi de la vie du salut de l’humanité. La Nitrophoska, par exemple, qui suscite une augmentation considérable de la production agricole, sert à confectionner des projectiles explosibles d’une force terrible. Des substances alimentaires sont de même employées dans d’industrie du meurtre.

Il s’ensuit que la révolution sociale ne se trouve point en face d’un problème économique, mais devant la nécessité de briser la violence et d’anéantir les monopoles de l’État.

L’abolition de l’État, cette maxime cardinale de l’anarchisme, est devenue la question qui décidera de la culture humaine, du développement de l’économie mondiale et enfin de la libération de l’humanité.

Dans le combat gigantesque auquel le prolétariat a à faire face, il se trouve un facteur qui peut être utilisé au bénéfice des masses qu’il faut émanciper.

Comme je viens de l’exposer, la production de l’azote est mise principalement au service de l’industrie de la guerre, spécialement au service des projectiles explosifs. Les effets en sont terribles, mais pour un chimiste rien n’est plus facile que de les rendre inefficaces.

Le bonheur de l’humanité peut en dépendre. L’azote utilisé comme gaz pendant la guerre rend le sol stérile pendant 4 à 5 ans : tout peuple est ainsi livré à la mort par la famine, même après une guerre « victorieuse », même après une révolution victorieuse, si l’ennemi s’est servi de gaz toxiques. Si l’on détruit l’azote préparé comme gaz explosif, il peut être très bien utilisé comme engrais.

Le premier devoir de la révolution sociale doit être la destruction de toutes les munitions de guerre à base d’azote, autrement dit de toutes les munitions qui peuvent assurer la prépondérance au militarisme soit à l’extérieur, soit à l’intérieur. Si la technique révolutionnaire ne réussit pas à détruire ces substances, elle est perdue d’avance. (Je ne fais qu’effleurer la question bien entendu.) Si elle y réussit, la révolution a en mains le moyen de s’assurer rapidement de la situation et d’acquérir une position invincible.

Il faut détruire les grandes masses de munitions, pour en extraire l’engrais précieux qui assurera l’abondance. Il faut le transporter tout de suite à la campagne et le distribuer gratuitement aux paysans, qui deviendront ainsi les amis des ouvriers des villes, car on peut se fier à la nature. La prochaine récolte donnera un résultat tellement étonnant que les soucis économiques disparaitront.

Il semble curieux de dire : « C’est l’azote qui est l’un des principaux facteurs économiques de la révolution sociale. » Il joue un rôle révolutionnaire dans la production agricole et il peut le jouer également dans la révolution. elle-même. C’est un facteur de premier ordre qui ne peut pas être négligé.

Il s’ensuit aussi que pour réussir la révolution sociale doit être anarchiste. Seul l’anarchisme-communiste comprend la nécessité de la destruction des engins de guerre, c’est-à-dire de l’État. Toute autre théorie et pratique révolutionnaire, qui pactise avec le principe étatiste, est obligé de poursuivre cette production meurtrière. Elle sera vaincue ; elle échouera, militairement et économiquement

Tendances psychologiques et économiques conduisant à l’anarchisme       

                              
Sans doute, les tendances économiques, qui aboutissent à l’anarchisme-communiste, ne suffiraient pas à y parvenir, si faisaient défaut les facteurs psychologiques. Bergson a dit très justement, que toute évolution se passe d’abord en l’individu – il en est de même avec les forces émancipatrices de notre temps. Elles se forment instinctivement dans l’intelligence humaine. Dans ce sentiment et cette création instinctives à l’œuvre dans l’humanité, nous avons la preuve de la réalisation lente des idées que nous autres anarchistes-communistes nous concevons clairement. C’est ainsi que les conceptions anarchistes sont fort bien justifiées par les paroles suivantes qui se trouvent dans un ouvrage de Théodor Lüddecke et Jérôme Davis, « Le Problème de la Paix industrielle » (Éditions Paul List, Leipzig), Lüddecke dit, entre autres :

« Le monde contemporain n’a pas de but, il n’y a pas à en douter, Si l’on observe le cours de l’évolution, on a l’impression d’un écoulement, d’une succession d’événements, sans dessein ni propos. Il y a manque d’une idée dirigeante stable. Ce qui manque au monde, c’est un plan social et économique. On n’aperçoit pas encore clairement les piliers, qui supporteront et devront supporter à notre époque de technique le grand bâtiment social. »

C’est fort juste. Nous pouvons nous montrer satisfaits que toute cette inquiétude et cette instabilité confirment notre idéal. D’autant plus est-il alors important de rester fidèles à nos idées. Qui, sinon nous, les anarchistes-communistes, pourrait fournir à l’humanité ce « plan social et économique », qui lui fait défaut ?

Même au sein des milieux éloignés de nous, on commence à comprendre que c’est l’État qui empêche un renouveau quelconque de la vie. Citons à nouveau Lüddecke, disant que si les tendances qui visent à rénover et assainir la société ne peuvent être réalisées, c’est parce que « l’appareil improductif de l’État pèse comme un parasite sur l’économie, vit de son sang et diminue en conséquence le standard de vie du dernier collaborateur à la machine ».

Quel anarchiste a démontré plus clairement le rôle néfaste de l’État ?

Dans cette clairvoyance instinctive qui se fait jour au sein de groupements toujours plus nombreux, gît l’avenir de l’anarchisme. Der la critique de l’État, il n’y a logiquement qu’un pas à la demande de son abolition. Nous voyons donc que l’anarchisme est dans le plan naturel du développement sociologique de l’humanité. Que cette évolution ait lieu rapidement ou lentement, qu’elle soit interrompue ou non, cela ne dépend que de l’activité des anarchistes conscients.

La rationalisation et l’anarchisme-communiste  
 

Au cours de la période révolutionnaire de 1917-1921, le capitalisme n’avait jamais osé espérer qu’il pourrait fouler aux pieds le mouvement ouvrier, comme il a réussi le faire plus tard.

Ce résultat fut surtout l’œuvre de la social-démocratie et du bolchévisme, c’est-à-dire du marxisme.

Le principe de la rationalisation en fournit la preuve. Le capitalisme a présenté la rationalisation dans ces termes : « De bas prix, des salaires élevés ». Naturellement le capitalisme n’a fait qu’accroître l’exploitation. En Europe, grâce aux syndicats centralistes et corrompus, la rationalisation a eu nettement comme résultat : « Accroissement de l’exploitation — des prix élevés — des bas salaires ! » (Il en est de même dans la Russie des Soviets.)

En tolérant que la rationalisation aboutisse à ces résultats, le mouvement ouvrier a rendu impossible de développer la rationalisation au détriment du capitalisme. Un mouvement ouvrier dans le sens anarchiste devrait proclamer : Des prix abaissés jusqu’au niveau des prix de revient, des salaires si élevés, que les capitaux investis ne rapportent plus d’intérêt.

Des savants « Nationaléconomistes » sourient, affirment sérieusement que les capitalistes ne voudront plus employer leurs capitaux dans de telles conditions. Or, c’est ce que nous voulons : La fin du capitalisme.

Ainsi nous voyons que la notion anarchiste de la rationalisation et de ses maximes aurait comme conséquences : annihilation des conceptions de prix et de valeur des marchandises par une production abondante, éviction du système des salaires, qu’il est impossible de faire cadrer avec une production vraiment libérée.

En résumé, nous voyons que les tendances de l’évolution de l’humanité s’inclinent vers nos idées :

Anéantissement de tout système basé sur le salariat, les produits de la nature et du travail humain à la disposition de tout être humain !

La technique moderne et l’avenir 
           

Prétendre que le capitalisme contient en soit les éléments du socialisme, est faux. Le socialisme et le communisme comme formes économiques de l’anarchisme — ils ne peuvent être réalisés qu’ainsi — créeront des bases économiques tout à fait nouvelles, surtout par les nouveaux éléments éthiques et moraux qu’ils renfermeront. Et il est sûr, que ce qui nous semble actuellement… l’apogée de la perfection apparaitra plus tard comme absolument imparfait. L’assertion que le capitalisme crée le socialisme ou ses conditions d’existence est fausse (seule la révolution sociale peut le faire) — de même qu’est fausse cette autre affirmation qui considère la technique comme un instrument du capitalisme et qui attribue à la révolution sociale le devoir de détruire la technique avec le système capitaliste.

L’anarchisme, en effet, n’est rien autre que le développement en toute liberté de tout ce que la nature, nos impulsions sociales et notre intelligence accomplissent déjà aujourd’hui imparfaitement et insuffisamment, empêchés qu’ils sont par les entraves autoritaires.

L’anarchisme est à l’œuvre au sein de la société, de la vie humaine, de l’impulsion des masses, de la vie intellectuelle et culturelle, dans la technique et dans l’économie. Il sera réalisé par la volonté active d’une minorité assez grande, par la révolution anarchiste. La révolution sociale aura peu de chose à détruire des facteurs techniques existants, elle en usera librement, voilà tout !

La vie sociale et économique se développe tout autrement que le marxisme l’avait cru. L’esprit qui l’influence (qui est naturellement aujourd’hui dans les intérêts des possédants) est bien défini dans un article du susdit Theodor Lüddecke, « Le nouvel esprit économique » :

« Ce que beaucoup d’industriels disent concernant la formation future des relations entre l’usine et les ouvriers, est quelquefois plus radicale que ce que certains utopistes socialistes pourraient rêver. Le principe dominant est la tendance d’unir les ouvriers au cadre et à la perspective de l’entreprise. Il faut que les ouvriers fassent partie intégrante des tendances de la production, créer une communauté de production, vivante, qui possède les mêmes intérêts. »

L’organisation ouvrière anarchiste unie en vue la production n’est rien de plus que cela. La révolution sociale n’aura rien à faire d’autre que détruire le monopole privé.

Lüddecke est impulsé, cela va sans dire, par des intérêts capitalistes et il ne comprend rien aux tendances qu’il préconise, car, en fin de compte, il s’écrie en soupirant :

« Ce qui nous manque ce sont des plans de réalisation, ou, comme Ford le dit, des plans sociaux. Nous avons besoin d’une nouvelle technique de la vie. »

Oui, nous avons besoin de tout cela, mais ce pauvre auteur ne se doute pas que l’anarchisme-communiste comporte déjà tout cela.

Les syndicats, le syndicalisme et l’anarchisme           
  

Les syndicats sont les pionniers de la révolution sociale à tel point qu’ils sont étroitement liés aux conceptions générales de l’anarchisme-communiste.

Mais, c’est une idée fausse d’apercevoir dans un syndicat en soi une incarnation de la libre société de l’avenir. Le syndicat n’est qu’une association d’intérêts pour le profit du prolétariat et l’histoire des syndicats nous apprend que même là où il a obtenu ses plus grands résultats, ceux-ci n’ont jamais abouti à une diminution du profit des patrons. Bien que les syndicats aient grandi en importance dans le monde entier, la classe capitaliste est devenue plus riche.

Il était nécessaire de dire cela pour faire comprendre que le syndicat n’a de valeur libératrice que comme organisation anarchiste.

Il en est de même pour le syndicalisme, quand il combat le mouvement et l’organisation anarchistes et ne veut pas d’une union autonome avec eux. Le meilleur exemple se trouve dans l’histoire du syndicalisme français qui se détacha hypocritement du mouvement anarchiste en parlant de « l’autorité du parti anarchiste », tomba ensuite dans la corruption et perdit sa valeur révolutionnaire. Ceux qui recommandent à l’ouvrier la vieille brochure d’Emile Pouget : « Le Syndicat », ne lui rendent pas un bon service. Toutes ses affirmations et hypothèses se sont montrées erronées. Surtout là où il prétend que le syndicalisme représente les intérêts économiques du prolétariat, tandis que l’anarchisme n’en expose que les idées et les buts. Inconsciemment, Pouget démontre par ses affirmations la grande pauvreté du syndicalisme, et encore son assertion n’est-elle pas juste, car nulle part le syndicalisme français n’a pu sauvegarder les intérêts économiques du prolétariat sans parler de ses devoirs dans l’avenir. Seule, une organisation syndicaliste qui place au dedans de, et œuvre de concert avec l’organisation anarchiste, peut accomplir des actions anarcho-syndicalistes, et sauvegarder des intérêts économiques et sociaux pour le présent et pour l’avenir.

Celui qui ne veut pas admettre cela, ne veut rien apprendre par les faits. Il mène le syndicalisme au destin qu’il a eu en France, ou, plus tard, aux Pays-Bas, où la plus grande partie du syndicalisme s’est alliée au bolchévisme, après avoir combattu pour « l’indépendance » du syndicalisme.

La preuve que le mouvement syndical n’a de valeur qu’en tant qu’organisation anarchiste, on l’aperçoit dans le sort du mouvement syndical centraliste, dans son impuissance malgré son grand nombre d’adhérents. Cette impuissance est basée sur le manque d’idées constructives. Le monde bourgeois le comprend fort bien et sait qu’il n’a rien à craindre d’un pareil mouvement. Voyons ce que W. Starcke en dit dans sa « Politique économique ou sociale » :

« On peut définir le mouvement syndical allemand en écrivant, que le temps de sa plus grande importance est passé depuis 1918. Il existe assez de forces à l’intérieur et à l’extérieur pour le décomposer, de sorte que ce mouvement ne retrouvera jamais son pouvoir du passé. La faute principale de leur faiblesse incombe aux syndicats eux-mêmes. Les syndicats n’ont pas encore bien compris la situation et les conditions générales de la production. La cause la plus profonde de la crise des syndicats, n’est pas encore comprise, c’est le manque d’idées. »

Ceux qui croient que le syndicat se suffit et préconisent son « indépendance », devraient bien réfléchir aux lignes ci-dessus.

La Liberté et le Droit des travailleurs à la Propriété commune   
 

C’est le but de l’anarchisme-communiste de réaliser ces deux principes dans la vie de l’homme et de la société.

Comment ces deux bases primordiales de nos conceptions commencent à se réaliser, nous pouvons le vérifier dans une entreprise coopérative, la Columbia Conserve Company, dont le siège est à Indiana (Amérique du Nord) qui a obtenu de forts beaux résultats et a ainsi démontré la praticabilité de nos idées.

De nos jours, on entend souvent dire que la liberté sera un empêchement à la production technique. Je ne fais que rappeler les paroles de Lénine sur la liberté comme un « préjugé bourgeois » et il n’y a pas un projet de socialisme gouvernemental qui ne se méfie de la liberté. Ceux qui croient à la nécessité d’une période transitoire pour le passage du capitalisme à la société libertaire, ne mettent pas non plus leur confiance en la liberté.

Il en va tout autrement avec nous, anarchistes-communistes. Seule la liberté nous apparait comme l’élément créateur d’un prolétariat et d’une humanité libérée.

Il faut donc nous réjouir lorsqu’un homme d’affaires, un homme pratique, vient confirmer nos conceptions et mettre fin à l’hypocrisie d’une dictature. W. P. Hapgood, le président de la coopération ci-dessus mentionnée, y parvient sans peine dans son précieux essai sur « L’Industrie et la Nature humaine » :

« Après l’amour, la liberté a la plus grande influence sur l’individu. La liberté permet à l’homme de faire un travail créateur. Qui connait l’industrie sait qu’elle n’est pas libre. 95 % des êtres humains employés dans l’industrie sont en vérité des esclaves. Les ouvriers n’ont aucune voix dans la gestion de leurs intérêts industriels, de ces affaires qui ont une si grande importance pour leur bien-être. Aussi longtemps que ce système durera, c’est-à-dire, aussi longtemps que la plupart des hommes se trouveront pendant la plus grande partie du jour dans une situation, qui ne leur procurera aucune satisfaction et détruit leurs forces, aussi longtemps la société se trouvera en danger, Inutile de chercher une preuve démontrant que l’ouvrier n’a pas une bonne impression du milieu où il s’exténue. Tout patron se plaint amèrement de l’attitude des ouvriers. Tous en rendent responsable la nature humaine, c’est-à-dire qu’ils sont convaincus que l’homme est pire qu’une bête, par nature, pour le moins amoral. Ces gens croient à la nécessité d’un système autocrate qui punirait les ouvriers qui ne travailleraient pas, comme eux, les chefs d’industrie, ils le désirent. Mais ces messieurs savent très bien, qu’eux-mêmes, ils ne voudraient pas travailler dans les conditions qu’ils imposent à leurs sujets. »

« Il est certain que le travailleur doit prendre part à la direction de l’industrie qui l’occupe, si l’on veut que son travail soit conforme au développement de la personnalité de chacun, et si l’on entend réussir. »

C’est un homme d’affaires, insistons-y, qui développe cette pensée, qui est la meilleure justification de l’anarchisme. Il a acquis cette conviction par son expérience pratique de la marche d’une coopérative, où tous les ouvriers ont le même droit de propriété, où tous ont la garantie des nécessités de la vie pour eux et leurs familles. En même temps cette association coopérative est l’une des plus grandes entreprises commerciales des États-Unis.

Voulons-nous autre chose que développer jusqu’au but une théorie qui se vérifie dans la vie pratique ?

Le problème économique et sa solution   
          

 Malgré toutes ces possibilités qui tendent à la réalisation de notre idéal, nous ne devons pas nourrir d’illusions : l’avènement de l’anarchisme-communiste est conditionné par la résolution prise par la classe ouvrière de triompher du système actuel en se servant de notre théorie et de nos méthodes d’action.

Sinon, nous ne renverserons pas le capitalisme. Au contraire, grâce à l’appui de la force gouvernementale, il possède une telle vitalité, qu’il sait parfaitement s’adapter aux formes nouvelles de la vie, selon le développement de la technique et conformément à l’évolution intellectuelle.

Mais de sa persistance surgissent de nouvelles situations révolutionnaires.

Il faut les utiliser. L’humanité se trouve actuellement dans une telle situation qu’une révolution victorieuse est possible.

L’humanité peut résoudre le problème mondial en attaquant les bases du système de l’État, de la méthode de la violence, de l’économie monopolisée. La formule et le but doivent être : l’anarchisme-communiste.

Mais il faut bien faire attention. La situation est « révolutionnaire » tout autant pour nos ennemis, les détenteurs du Pouvoir ! La situation du monde comporte une décision rapide. La seconde guerre mondiale est inévitable, si la révolution sociale ne le prévient pas.

Pour qu’elle éclate et triomphe, il faut éclairer les esprits, leur bien montrer la situation, les convaincre que la révolution sociale doit avoir lieu selon les idées de l’anarchisme-communiste si l’on veut atteindre le but poursuivi : le bonheur de toute l’humanité.

Conclusion : l’anarchisme est une réalisation pour les temps actuels.

[3]


Pierre Ramus, in La Brochure Mensuelle (novembre 1934) 

 

[1] Depuis que ces lignes ont été écrites, le nombre des chômeurs a considérablement augmenté. 

[2]  Voir note fin de la brochure. 

[3] Dans une serre dépendant d’un institut agronome expérimental à Ludwigshafen, sur les bords du Rhin, dans une région classée parmi les plus stériles de l’Allemagne occidentale, on est parvenu à faire croitre des bananes, de la canne à sucre, du riz, des ananas, du café, du thé, du caoutchouc, etc. Et cela grâce à une combinaison d’engrais azoté et de châssis. Les bananes cueillies dans cette serre équivalaient, pour la qualité, à celles importées des tropiques.
Dans les champs dépendant de cet institut, l’addition d’un kilo d’azote pur aux autres engrais produisait une augmentation de rendement en blé de 20 kgs par hectare. De même, les prairies recevant de l’engrais azoté fournissaient une nourriture plus profitable aux vaches et augmentaient les journées de traite. 
 

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