★ La fermeture de la pensée critique en Islam
" La question de l’orthodoxie ne se pose pas seulement dans le monde chrétien du Moyen Age. Elle s’exprime également dans le monde musulman à travers la notion d’ijtihâd, terme au contenu complexe mais qui signifie en gros recherche, effort de réflexion. L’islam a connu une période florissante qui a vu un développement important de la pensée critique, alimenté notamment par la diffusion des traductions en arabe d’auteurs grecs. Cette période a subi un coup d’arrêt vers les XIe-XIIe siècles, qu’on désigne par l’expression « fermeture des portes de l’ijtihâd ». Ce processus se passe justement au moment où on peut dire que les « portes de l’ijtihâd » s’ouvrent dans l’Occident chrétien grâce à l’introduction de la pensée aristotélicienne, par la médiation de penseurs musulmans tels qu’Averroès. La culture musulmane était alors d’une richesse incroyable dans tous les domaines : mathématiques, sciences de la nature, médecine, arts. Elle avait assimilé l’apport culturel du monde grec antique mais aussi celui de l’Inde. Lorsque les croisés arrivèrent en Terre Sainte, ils apparurent – à juste titre – aux yeux des Arabes comme des barbares grossiers et ignorants.
La question de l’orthodoxie ne se pose pas seulement dans le monde chrétien du Moyen Age. Elle s’exprime également dans le monde musulman à travers la notion d’ijtihâd, terme au contenu complexe mais qui signifie en gros recherche, effort de réflexion. L’islam a connu une période florissante qui a vu un développement important de la pensée critique, alimenté notamment par la diffusion des traductions en arabe d’auteurs grecs. Cette période a subi un coup d’arrêt vers les XIe-XIIe siècles, qu’on désigne par l’expression « fermeture des portes de l’ijtihâd ». Ce processus se passe justement au moment où on peut dire que les « portes de l’ijtihâd » s’ouvrent dans l’Occident chrétien grâce à l’introduction de la pensée aristotélicienne, par la médiation de penseurs musulmans tels qu’Averroès.
La culture musulmane était alors d’une richesse incroyable dans tous les domaines : mathématiques, sciences de la nature, médecine, arts. Elle avait assimilé l’apport culturel du monde grec antique mais aussi celui de l’Inde. Lorsque les croisés arrivèrent en Terre Sainte, ils apparurent – à juste titre – aux yeux des Arabes comme des barbares grossiers et ignorants.
Pour comprendre la perspective dans laquelle nous situons le présent essai, il convient de dire quelques mots sur ce qui nous semble être une donnée essentielle de l’islam : la perspective juridique. Le texte fondateur de cette religion, le Coran, apparaît comme un document où sont consignées quantité d’informations sur ce qu’il est permis et ce qui est interdit de faire. Il définit des normes applicables par la société. A ce titre, l’exégèse du Coran est toujours une exégèse juridico-théologique. Le Coran est essentiellement constitué de récits métaphoriques et allégoriques qui n’ont de sens que pour les Bédouins de la péninsule arabique du VIIe siècle, auxquels ils s’adressent. Le Paradis y est décrit comme l’antithèse du spectacle quotidien, quelque peu torride et sablonneux, du Bédouin : on y trouve de l’eau en abondance, des jardins luxuriants, le lait et le miel coulent à flot, etc [1]. S’il fallait absolument considérer le Coran comme un document universel pris absolument à la lettre, la Normandie serait bien proche du Paradis.
Les versets prescriptifs du Coran représentent une partie restreinte du texte, mais une partie non négligeable : sur 6300 versets, 500 concernent la vie sociale. 80 versets définissent de manière précise des règles concernant la pureté rituelle, les interdits alimentaires, le jeûne, les mariages et les divorces, les successions et la tutelle des orphelins, la punition du vol, de l’adultère. Un authentique embryon de code civil. C’est que le Prophète fut à Médine, de 622 à 632, un véritable chef d’État et les problèmes posés pour assurer sa succession n’eurent rien de théologiques.
La « visibilité » de l’islam tel que nous le donnent à voir aujourd’hui ses porte-parole les plus ostensibles se limite à la partie prescriptive, qu’il s’agisse de prescriptions alimentaires, vestimentaires ou autres. Il reste que cette tendance normative se trouve dès le début : C’est le triomphe des courants normatifs au sein de l’islam qui a conduit à la « fermeture de l’ijtihâd » à partir du XIe siècle.
Les auteurs musulmans interprètent aujourd’hui de manière diverse la « fermeture » de la recherche critique qui entame un long processus de décadence intellectuelle. Certains vont même jusqu’à nier cette fermeture. Il est vrai que le processus fut très long et que la culture musulmane continua de rayonner pendant très longtemps, ce qui contribua à occulter le phénomène de décadence qu’elle subissait. En outre, ce phénomène toucha peu le domaine de la réflexion juridique, central dans la culture islamique.
Mahdi Elmandjra n’a pas tort de dire que « jamais, à aucune époque, l’histoire ne nous a rapporté qu’un ouléma, docteur en fiqh [2], ou chef d’État a émis une fatwa, une loi ou un ordre de fermer la porte de l’ijtihâd. C’est plutôt la pensée arabe qui s’est figée sur ses positions au lieu de suivre le cours de l’histoire. Le résultat de cette attitude est un état de léthargie, de régression et de sous-développement. Les facteurs de cette situation sont multiples et ne sont plus un mystère pour personne. L’ijtihâd vit une crise due à une stagnation intellectuelle dont les effets se sont répercutés sur tous les domaines. On assiste par conséquent à une régression de la création en matière d’ijtihâd [3]. »
Si l’optique de M. Elmandjra est dans l’ensemble juste, on peut avancer cependant deux objections :
• Il y a effectivement eu, à l’époque, des hommes qui, se réclamant de l’orthodoxie islamique, ont tenté et souvent réussi à briser l’élan de l’ouverture culturelle de la civilisation musulmane, en particulier en Espagne. L’arrêt de toute réflexion critique (l’ijtihâd) dans une société aussi développée qu’était la société arabo-musulmane du XIe siècle ne peut être que le résultat de l’emprise extrêmement brutale d’une pensée orthodoxe. Un tel phénomène ne survient pas sans causes identifiables. Il ne survient pas non plus par le simple décret d’un ouléma ou d’un docteur en fiqh : il s’agit de la manifestation historique d’une crise globale, que nous tenterons de cerner.
• Il n’est pas certain que les causes de cette situation aient cessé d’être un mystère pour nombre d’auteurs musulmans. L’auteur continue en effet son exposé en affirmant qu’il y a eu un déséquilibre entre les différentes formes d’ijtihâd, entre la réflexion en matière de jurisprudence temporelle [4] et de jurisprudence spirituelle [5]. Autant cette dernière est riche, dit-il, autant la première est pauvre. On peut se demander précisément si l’approche adoptée par M. Elmandjra n’est pas le symptôme même de la fermeture de l’ijtihâd dans la mesure où il limite l’effort de recherche aux domaines de la jurisprudence. Une société qui axe l’essentiel de ses efforts intellectuels dans le domaine de la jurisprudence au détriment de ce qu’on peut bien appeler l’activité créatrice de la société civile est inévitablement en régression. L’insistance mise sur le domaine prescriptif conduit à la conservation de ce qui est et empêche toute évolution.
Il semble difficile aux auteurs musulmans – imprégnés de culture juridique – d’intégrer l’idée que la « fermeture des portes de l’ijtihâd » n’ait pas été décrétée par quelqu’un – si possible un docteur de la loi – ce qui évacue toute réflexion sur le phénomène comme un fait résultant de circonstances sociales, politiques,
Il est significatif que M. Elmandjra cite un philosophe indo-pakistanais qui définit l’ijtihâd comme l’effort « en vue de formuler un jugement indépendant sur une question légale » (je souligne) [6]. L’auteur commente d’ailleurs : « l’Ijtihâd est un effort effectué par un juriste soit pour extraire une loi ou une prescription de sources scripturaires peu explicites, soit pour formuler un avis juridique circonstancié en l’absence de textes de référence. » Le champ d’intervention de la réflexion critique se limite donc au domaine prescriptif (ce qu’il faut faire et ce qu’il ne faut pas faire) à partir de « textes de référence » dont on comprend qu’ils sont d’essence religieuse.
Le constat de M. Elmandjra nous semble donc juste, mais en voulant faire porter l’ijtihâd sur la nouvelle réalité politique et économique de manière à ce que « la chariâ continue à rayonner dans le monde musulman », il se situe dans la perspective même de la fermeture de l’ijtihâd, dans la mesure où il circonscrit toute perspective d’évolution culturelle dans le cadre de la religion : le principe même d’une religion est de se référer à des textes fondateurs dont on peut douter que dix ou quinze siècles plus tard ils soient adaptables. Il devient tentant de s’arc-bouter sur des textes en proclamant que la société a dévié et doit s’y réadapter plutôt que de faire le constat que l’évolution de la société a rendu ces textes tout simplement caducs.
Si, par analogie, on peut considérer que les « portes de l’ijtihâd » se soient ouvertes dans l’Occident chrétien au moment même où elles commençaient à se fermer dans le monde musulman, l’« ouverture » de ces « portes » se manifeste en Europe occidentale par la remise en cause, timide tout d’abord, puis progressive, de l’emprise du religieux sur la vie culturelle. Cette remise en cause commence au moment où la pensée d’Aristote pénètre les universités occidentales (grâce à un penseur musulman) et où se fait la distinction fondamentale entre théologie et philosophie – distinction qui n’exista que timidement et éphémèrement dans le monde musulman. On peut dire, pour résumer sommairement, que dans le conflit qui l’opposa à la philosophie, la théologie l’emporta dans le monde musulman mais fut vaincue dans l’Occident chrétien.
Cristallisation de la pensée juridique
Tout en réfutant que la « fermeture de l’ijtihâd » a été décrétée, Mohammed Iqbal fait un constat terrible de la situation dans laquelle se trouve le monde musulman. Le refus de l’ijtihâd, dit-il, « est une pure fiction suggérée en partie par la cristallisation de la pensée juridique dans l’Islam et en partie par cette paresse intellectuelle qui, spécialement dans la période de décadence spirituelle, transforme en idoles les grands penseurs. Si quelques-uns des docteurs ultérieurs ont été partisans de cette fiction, l’Islam moderne n’est pas engagé par cet abandon volontaire de l’indépendance intellectuelle ». Le constat n’empêche aucunement une attitude de déni. Il n’est pas besoin que la « fermeture des portes de l’ijtihâd » ait été décrétée par qui que ce soit, elle est simplement un fait qu’il suffit de constater et dont il faut définir les causes. Le parti-pris typiquement islamique de tout considérer d’un point de vue prescriptif empêche peut-être d’aborder la question sous cet angle.
Pour comprendre pourquoi et de quelle manière les « portes de l’ijtihâd » se sont fermées dans le monde musulman, il convient peut-être de comprendre pourquoi et comment elles se sont « ouvertes » dans le monde occidental. Pour Mohammed Iqbal, l’ijtihâd est « le principe de mouvement dans la structure de l’islam » ; aussi appelle-t-il à « reconstruire la pensée religieuse de l’Islam » pour qu’elle soit en phase avec le monde contemporain. Or précisément, le mouvement irrésistible de la culture de l’Europe occidentale vers la domination politique, économique et culturelle vient peut-être justement que son « ijtihâd » a consisté à ne pas envisager à « reconstruire la pensée religieuse » de la chrétienté, mais à la remettre en cause et à dissocier radicalement la sphère du religieux de la sphère du temporel, à éliminer autant que possible l’intervention du religieux dans les domaines culturel, politique, et scientifique.
De fait, l’évolution de la pensée, de la science et des arts de l’Europe occidentale va consister à s’affirmer contre le religieux, ce qui ne fut pas toujours sans risque, comme en témoigne l’interminable liste d’hommes et de femmes persécutés et brûlés vifs au nom de la religion chrétienne qui, pendant des siècles, tenta de s’opposer à toute évolution intellectuelle vers une pensée libérée de l’emprise religieuse.
Et la principale erreur du monde musulman fut sans doute de fixer indéfiniment l’image négative qu’il se fit (à juste titre) des Occidentaux au moment des croisades, et de ne pas la réactualiser après que ceux-ci, assimilant l’apport de la civilisation musulmane, dépassèrent leurs maîtres dans les domaines mêmes où la civilisation islamique avait été si florissante.
Cette fermeture du monde musulman est bien le produit de l’emprise de l’orthodoxie religieuse sur la société civile, ce que reconnaît d’ailleurs M. Elmandjra :
C’est qu’à la fin du IVe siècle de l’Hégire (XIe siècle), d’aucuns décidèrent de fermer la porte a cet “Ijtihâd” en arguant que tout était clair dans le Coran, la Sunna et dans la Sharia qui en découle. Ce fut une erreur énorme, pour la simple raison qu’on ne saurait faire une lecture du Coran que d’une manière dynamique qui présuppose et accepte le changement.
Mais là encore, le constat reste dans une perspective essentiellement religieuse puisque tout se détermine à partir de la lecture d’un livre sacré. Selon cette optique, la stagnation du monde musulman serait le résultat d’une décision inappropriée dans le domaine religieux.
La coupure principale entre le monde musulman et le monde occidental réside sans doute dans le fait que dans ce dernier la distinction entre la sphère religieuse et la sphère civile est accomplie. A de rares exceptions près, les chercheurs, dans quelque domaine que ce soit, ne se demandent pas si les résultats de leurs recherches concordent avec les prescriptions divines.
Cela ne signifie aucunement que la question est définitivement établie : le danger d’une régression reste important, car les forces qui, dans le monde occidental, tentent d’imposer un retour du religieux restent puissantes. Il est significatif que dans ce combat, elles ont le soutien des religieux musulmans, et pas forcément les plus radicaux.
La succession du Prophète
Comme le christianisme, l’islam a connu de nombreux mouvements de contestation interne qui entendaient chacun représenter la vraie interprétation des Écritures saintes. Cela commença dès le début, dès la mort du prophète, qui ne laissa aucune directive quant à sa succession. Ce fut finalement son beau-père, Abu Bakr (le père d’Aïcha) qui fut désigné. C’était un fidèle de la première heure, membre de la même tribu que Mohammed, les Quraych. Les proches de Mohammed se sentirent lésés, en particulier Fatima, sa fille, et son époux Ali, également cousin du Prophète. Ali s’opposa à cette nomination, estimant que la succession devait lui appartenir. Il était soutenu par certains compagnons du Prophète, qui constituèrent ainsi la chï‘at ‘Alî, les chiites.
Ali accepta finalement la nomination d’Abu Bakr, mais à la mort de celui-ci, ce fut Umar, un membre de la même tribu, qui fut désigné. Umar voulut en revenir au principe d’électivité qui avait désigné Abu Bakr. Un conseil de six membres fut convoqué qui aboutit à la désignation de Uthman. Les conditions de cette nomination méritent d’être mentionnées : en fait l’un des membres du conseil désigna Uthman et les autres avalisèrent la décision. Ça sent la magouille à plein nez.
Uthman dirigera donc les musulmans pendant douze ans. Ali avait été une fois de plus évincé. C’est qu’il avait un handicap majeur : il s’était mis Aïcha a dos ; or la veuve de Mahomet avait un poids politique considérable. Ali avait autrefois pris position contre Aïcha lors d’une campagne l’accusant d’adultère.
Uthman faisait partie du clan des Banu Umayya et se mit rapidement à favoriser son clan dans la répartition des charges lucratives. Or si Uthman était un converti de la première heure, son clan s’était, au début, violemment opposé à Mohammed. Les compagnons du Prophète voyaient donc avec une nette réprobation d’anciens adversaires s’enrichir. Les Compagnons du prophète qui critiquaient la gestion d’Uthman se voyaient exilés ou molestés. La population se plaignait de la tyrannie des gouverneurs.
En 656, Médine fut assiégée par des hommes en armes afin de forcer Uthman à recevoir leurs doléances. Uthman fut finalement tué.
Ali fut proclamé calife à Médine, mais certains Compagnons le tenaient pour responsable de la mort d’Uthman. Deux rivaux, soutenus par Aïcha, revendiquaient également le califat. Ils furent vaincus en 656 par Ali lors de la bataille dite « du Chameau ». Ali dut encore livrer bataille contre Mu’hâvia, le gouverneur de Damas, un parent d’Uthman, motivé aussi bien par le désir de venger le calife assassiné que par celui d’accéder au califat. Les deux armées s’affrontèrent en 657, mais un arbitrage fut finalement décidé : deux hommes, représentant chacun un camp, furent chargés de trouver une issue au conflit. Mais l’homme qui représentait Ali le trahit et l’arbitrage se fit en sa défaveur. Ali conserva le titre théorique de calife, mais son adversaire conquit par les armes les territoires du califat, ne laissant à Ali que l’Irak. Ali fut assassiné en 661 ; Mu’hâvia devint calife et fonda la dynastie omeyyade, à Damas.
Un débat de fond s’engagea sur les conditions permettant d’accéder au titre de calife ; chacune des deux tendances en présence développant des idées conformes à ses intérêts. Les partisans de Mu’hâvia fondèrent ce qui allait devenir le sunnisme, dont la doctrine stipule que le calife devait être élu ou désigné dans la tribu de Quraych – la tribu du prophète. Ainsi les prébendes iraient prioritairement aux membres de cette tribu. En outre, les sujets du calife lui devaient une obéissance inconditionnelle, quelles que soient ses fautes. Ainsi, on garantit ses arrières, c’est-à-dire la pérennité de la transmission.
Les partisans d’Ali estimaient que le califat revenait aux seuls descendants du Prophète (ce que n’était pas Ali) ou aux gens de sa Maison (ce qu’il était, puisque c’était son gendre).
On voit donc que dès la disparition de Mahomet, l’islam se divise, mais pas sur des questions religieuses : sur des affaires parfaitement temporelles. C’est, littéralement, à des conflits politiques liés à la succession d’un monarque qu’il s’agit. Au point où on peut même se demander si on a réellement affaire à une religion, et si l’islam n’a pas été construit comme religion bien après la mort de son fondateur pour légitimer et stabiliser le pouvoir politique mis en place.
Pratiquement dès le début, comme conséquence d’une lutte pour le pouvoir bien plus que sur des divergences théologiques, l’islam se divise en deux courants. Trois courants, plus exactement. Car certains partisans d’Ali avaient refusé l’arbitrage : selon eux, c’était une erreur de cesser la bataille car le jugement de Dieu sur cette question se serait révélé à l’issue de celle-ci. Ils quittèrent l’armée d’Ali et, rejoints par d’autres, formèrent le troisième grand groupe de l’islam, les « sortants », c’est-à-dire les kharijites.
Les kharijites s’en prenaient à Uthman, bien sûr, mais aussi à Ali qui n’avait pas su défendre son droit. Ils développèrent une conception originale du pouvoir politique, c’est-à-dire du califat. Le calife devait être élu par la communauté musulmane, et pouvait être n’importe qui, même un esclave noir. De telles positions leur valurent de nombreux adeptes parmi les musulmans non arabes.
Les relations tendues entre Ali et les kharijites aboutirent à la bataille de Nahrawân, en juillet 658, où les kharijites furent battus. En 661, un kharijite assassina Ali pour venger les siens. Les kharijites aidèrent la calife Mu’hâvia à vaincre Ali, puis les Abassides à vaincre les Omeyyades. Entre 658 et 680, ils se soulevèrent une vingtaine de fois. Ils se dispersèrent mais se fixèrent surtout à Bassorah en Irak. De nombreuses sectes sont issues de ce courant, qui s’implanta fermement dans le Maghreb, en Tunisie notamment, à Zanzibar et à Oman.
Un empire bâti par la conquête
Un empire s’était constitué par la conquête ; le conquérant s’est trouvé devant la nécessité de répondre à des questions ponctuelles concernant les règles sociales et le droit. Parfois des coutumes locales se trouvaient avalisées par le prophète, parfois les prescriptions étaient explicitement formulées par lui – oralement.
Le mode de détermination de ces prescriptions est intéressant : lorsqu’un problème se posait, Mahomet avait un rêve, Dieu lui apparaissait qui lui révélait la solution. Parfois le problème posé concernait directement le Prophète, et les solutions trouvées allaient toujours dans le sens de son intérêt. Ce qui fit dire à Aïcha, un jour : « Il me semble que ton seigneur se hâte de satisfaire tes désirs [7]. »
Mahomet était de fait un chef d’Etat qui se trouvait à la tête d’un empire. Jusqu’à la fin du VIIe siècle ses prescriptions était transmises oralement. Lorsque les califes – les premiers chefs d’Etat successeurs du Prophète – entrèrent en fonctions, ils désignèrent des juges dans les principales villes, qui sans doute ne connaissaient pas grand chose de la « doctrine » et agirent de manière pragmatique. Ce furent les premiers juristes de l’islam.
Mais peu à peu apparut la nécessité d’uniformiser la loi. On mit par écrit les paroles attribuées à Mahomet et elles furent diffusées dans l’empire : ce sont les hadiths, ou recueil des enseignements oraux, supposés ou réels du Prophète, auxquels s’ajoutèrent les dires des principaux Compagnons et de savants de la génération qui a suivi immédiatement. Aïcha elle-même serait l’autrice de plus de 2000 hadiths et elle était souvent consultée par les compagnons de Mahomet.
Il y a donc deux sources principales de droit : le Coran, qui est l’expression directe de Dieu, et les hadiths, qui sont la parole du Prophète. Ils ont un point commun avec les Évangiles, c’est d’avoir été rédigés une à deux générations après la mort de l’intéressé.
Plusieurs écoles de droit musulman apparurent ainsi, notamment celle de Mâlik ibn Anas (mort en 795) qui domina dans le Maghreb et en Andalousie, Abû Hanîfa (mort en 767) qui domina dans les territoires occupés par les Turcs, Shâfi‘î (mort en 820) répandue en Égypte, en Afrique orientale et en Indonésie. Au Xe siècle, le droit musulman est définitivement constitué.
La Réforme en Europe
L’Église catholique a réprimé de manière constante toutes les hérésies qui sont apparues. Elle ne réussit cependant pas à empêcher la scission majeure qui apparut au XVIe siècle avec la Réforme protestante, scission qui était en germe depuis très longtemps et dont il est difficile de nier que son succès a quelque chose à voir avec l’apparition de l’imprimerie. On constate ainsi qu’une mutation majeure dans la sphère du religieux est produite, du moins en grande partie, à la suite d’une évolution technologique majeure.
L’Église a longtemps interdit la traduction en langue vulgaire des Écritures saintes, afin que l’interprétation des textes reste du domaine exclusif du clergé. La principale réclamation des Réformés protestants était précisément que les textes sacrés soient accessibles en langue vulgaire, condition indispensable pour réaliser la seconde réclamation : la faculté pour chaque individu d’interpréter lui-même, en toute liberté, lesdites Écritures. Il ne faut cependant pas se tromper sur le caractère subversif de cette liberté : peu de gens savaient lire, de toute façon, et la « liberté d’interprétation » des Écritures se résumait à la liberté pour un petit nombre de personnes de fournir aux masses incultes leur propre interprétation.
Bakounine montre de manière convaincante que la Réforme, dont l’idée de départ était la réclamation de la liberté, aboutit en fin de compte à son contraire : les régimes absolutistes qui se constituent au XVIe-XVIIe siècle en Europe sont les enfants de la Réforme, et l’aîné de ces régimes est celui qui fut mis en place par Henri VIII d’Angleterre.
La thèse de Bakounine est la suivante [8] :
• La Réforme brisa la puissance de l’Église catholique qui ne put désormais se soutenir par elle-même : « Pour maintenir son existence elle eut besoin de l’assistance des souverains temporels des États. Mais les souverains, on le sait, ne donnent jamais leur assistance pour rien… » « Après la Réformation, elle devint dans tous les pays, sans excepter même la Suisse, l’alliée des gouvernements contre les peuples… »
• La noblesse avait été avant la Réforme « la propriétaire privilégiée et à peu près exclusive de la terre » ; après la Réforme elle « avait perdu toute son indépendance politique ». Elle avait été, comme l’Église, « la rivale et l’ennemie de l’État. Après cette révolution elle en devint la servante, comme l’Église et comme elle, une servante privilégiée. »
• Quant à la bourgeoisie, elle « s’était vue complètement délivrée de la tyrannie et du pillage des seigneurs féodaux, en tant que bandits ou pillards indépendants et privés ; mais elle se vit livrée à une nouvelle tyrannie et à un pillage nouveau, et désormais régularisés sous le nom d’impôts ordinaires et extraordinaires de l’État, par ces mêmes seigneurs devenus des serviteurs, c’est-à-dire des brigands et des pillards légitimes de l’État. » La Réforme fit « perdre à la classe moyenne en liberté peut-être le double de ce qu’elle lui avait donné en sécurité ».
• Quant au petit peuple des « des paysans et des ouvriers des villes », qui s’étaient tout d’abord soulevés au cri de « Guerre aux châteaux et paix aux chaumières », le « mouvement grandiose » qu’ils déclenchèrent pour s’émanciper fut trahi « par la classe bourgeoise et maudit par les chefs du Protestantisme bourgeois, Luther et Mélanchton » ; il fut « étouffé dans le sang de plusieurs dizaines de milliers de paysans insurgés. Dès lors les paysans se virent plus que jamais rattachés à la glèbe, serfs de droit, esclaves de fait, et ils le restèrent jusqu’à la révolution de 1789-1793 en France, jusqu’en 1807 en Prusse et jusqu’en 1848 dans presque tout le reste de l’Allemagne ».
La Réforme, dit enfin Bakounine, eut pour effet d’assujettir encore plus le peuple aux princes, devenus grâce à la Réforme les chefs religieux dans leurs États. Bakounine aurait pu ajouter que l’une des principales motivations des princes européens à se convertir à la Réforme fut de pouvoir s’approprier les biens de l’Église.
Les partisans de l’approche exclusivement religieuse du problème de la Réforme ne se satisferont évidemment pas d’une explication qui en souligne les aspects sociaux et politiques. L’intérêt de l’approche bakouninienne est cependant de montrer que désormais, un phénomène religieux ne peut plus s’expliquer en se limitant au domaine théologique.
Ce que décrit Bakounine est le début de la formation de l’État moderne, dans sa forme absolutiste, caractérisé par la soumission de l’aristocratie au service de l’État, par la subordination de la sphère religieuse à l’État et, bien que cela n’apparaisse pas dans les passages cités, mais qui est largement développé ailleurs, la montée de la bourgeoisie comme classe dominante [9].
Personne aujourd’hui ne songe à expliquer l’évolution propre de l’Europe occidentale par une bonne interprétation des Écritures saintes. Or, encore aujourd’hui, nombre d’auteurs musulmans réclament l’insertion des sociétés islamiques dans la « modernité » par une réforme de l’interprétation des textes.
Les auteurs musulmans, y compris les auteurs contemporains, soulignent qu’il y a eu dans l’islam de nombreux mouvements de réforme.
Depuis sa naissance voilà quatorze siècles, l’islam a connu des réformes en cascade. Comme les autres religions, il s’est scindé en une myriade de sectes et sous-sectes prétendant chacune incarner la version véritablement réformée de la foi. La plus importante de ces divisions a conduit au clivage entre sunnites et chiites [10] .
Mais regrette-t-on, les courants réformateurs n’ont jamais pu « prendre la main sur le plan politique, la seule chose qui leur aurait permis de se renforcer » [11] .
L’opposition entre foi et raison
L’opposition entre foi et raison, qui apparaît dans l’Occident médiéval à partir du XIe siècle, est loin d’être absente de l’islam médiéval jusqu’au XIe siècle, et même après. Dans les deux cas il ne s’agit pas d’une opposition dans le sens où la raison tente d’éliminer la foi, mais dans le sens d’une tentative de dialogue dans lequel la foi affirme sa prééminence et la raison tente de montrer qu’elle n’est pas incompatible avec la foi. A de très rares exceptions près, l’athéisme n’est pas encore au programme.
Un courant de l’islam, le mutazilisme, qui apparut au VIIIe siècle et disparut au XIIIe, défendait le libre arbitre et l’exercice de la raison. Il affirmait également la nécessité de situer le Coran dans son contexte. Le mutazilisme, qui tentait de montrer la compatibilité entre la philosophie et la religion, restait cependant une école de pensée théologique, avec les méthodes propres à toute religion lorsqu’elle domine : leurs options ayant été adoptées par les califes à partir de 827, les mutazilites organisèrent entre 833 et 848 des persécutions en bonne et due forme contre les érudits qui n’adhéraient pas à leurs thèses et qui refusaient d’admettre que le Coran était une création humaine. Le mouvement commença à décliner quand un calife décida finalement de ne plus les soutenir.
Les persécutions organisées par les mutazilites furent sans doute l’une des raisons de l’échec de ce courant. Cette école disparaîtra sous les coups de l’orthodoxie sunnite qui considérait que la révélation divine n’avait pas à être soumise à la critique.
L’apparition du mutazilisme au VIIIe siècle sous le califat de Bagdad n’a rien pour surprendre. C’était un centre culturel au rayonnement incomparable, d’innombrables lettrés s’y trouvaient qui s’occupaient notamment à traduire les textes grecs. Après Averroès, dit Dominique Urvoy, c’est-à-dire au XIe siècle, on constate « la perte d’audience de la philosophie au profit de la mystique » [12].
Les auteurs musulmans du Moyen Age qui contestent la croyance en une révélation divine, qui nient la validité des Écritures révélées et la prophétie ne sont certes pas nombreux mais ils ne manquent pas. La croyance en la prophétie est un point central du dogme musulman puisqu’il ne suffit pas de croire en un seul Dieu, il faut aussi croire que Mahomet est son prophète. Citons au IXe siècle le théologien et philosophe néoplatonicien Ibn al-Rawandi, au XIe siècle le poète Abu ‘l-‘Ala’ al-Ma’arri et un philosophe, al-Razi (dit Rhazès).
Ibn al-Rawandi et Rhazès écrivirent des ouvrages qui rejetaient explicitement la notion de prophétie. Leurs livres n’ont pas survécu et sont surtout connus par les citations qu’en font les auteurs qui les réfutent, ou par les ouvrages écrits par des admirateurs, qui les citent (c’est le cas de Rawandi.) Ce qu’on en sait suffit cependant pour montrer le caractère radical de leur critique. Les prophètes y sont décrits comme des imposteurs, des charlatans qui exploitent la crédulité des gens grâce à leur connaissance des phénomènes naturels [13]. Ils pensent que la raison suffisait pour mener l’humanité à la vérité, c’est-à-dire à Dieu. Ils rejettent également l’idée du mal et de la douleur comme justification d’une punition divine.
Il ne faut pourtant pas voir ces auteurs comme des athées. Ils critiquent la religion mais ne remettent pas en cause l’existence de Dieu.
Les penseurs non orthodoxes de l’islam n’ont jamais réussi à constituer au sein du monde musulman au mouvement équivalent à celui des Lumières en Europe occidentale. Il ne faut cependant pas mythifier ce mouvement. Il n’a jamais été une vague énorme de rationalisme submergeant la pensée religieuse dominante à l’époque. S’il était possible de faire des statistiques concernant la publication des livres au XVIIe et au XVIIIe siècles, on constaterait que les ouvrages bien-pensants allant dans le sens de l’idéologie dominante furent considérablement plus nombreux que ceux qui suivaient l’esprit nouveau. Ce qui caractérise cette époque, c’est que l’esprit des Lumières a touché d’abord un petit nombre de gens, mais situés en haut de l’échelle sociale, et qu’il a peu à peu descendu jusqu’aux classes moyennes pour finalement imprégner une partie importante de la société.
Les auteurs musulmans libéraux
Les auteurs musulmans libéraux d’aujourd’hui pensent que les penseurs qui déviaient de l’orthodoxie ont pu malgré tout affecter la rigidité de l’islam institutionnel : on cite à loisir les mœurs éclairées de l’Espagne musulmane, la relative tolérance dont bénéficiaient les non-musulmans dans l’empire ottoman, où « la nature subversive d’une littérature arabe médiévale aussi espiègle que grivoise » . [14] Tout cela est bien beau, mais il n’y a pas de quoi fouetter un chat. L’auteur de l’article confirme d’ailleurs que « la “réforme” dans l’islam a le plus souvent emprunté l’autre direction, celle de la réaffirmation de la primauté des textes fondateurs et des premiers théologiens sur les interprétations ou les apports ultérieurs ».
Les purges périodiques opérées par ces divers mouvements ont eu pour effet de réduire le canon sunnite à un petit échantillon de sources et d’interprétations. Pour reprendre une expression arabe, ils ont “fermé la porte de l’‘ijtihâd’ ”, ou raisonnement spéculatif, permettant aux savants traditionalistes d’énoncer une vision utopique de l’islam comme système clos n’attendant plus qu’à être appliqué à la lettre par un souverain juste. En d’autres termes, ce type de “réforme” a constamment entraîné la foi dans une impasse philosophique [15].
L’auteur de l’article, qui adopte une attitude de retrait relatif par rapport au sujet qu’il traite, en reste cependant à l’idée que les modifications qui doivent être apportées à la société musulmane pour la mettre en phase avec le monde moderne restent des réformes à caractère religieux.
Les auteurs musulmans ont cependant raison d’invoquer l’absurdité de l’attitude occidentale consistant à surimposer sur les sociétés islamiques des modèles politiques européens, comme la « démocratie ». On peut cependant difficilement reprocher aux colonisateurs d’avoir ignoré par quel lent processus la notion de démocratie a fini par s’imposer en Europe : ces hommes n’étaient ni historiens ni philosophes, c’étaient des conquérants arrogants, ethnocentristes dont la motivation était la domination politique et l’exploitation des ressources des pays dominés.
On pense à Hegel qui explique dans la Philosophie du droit que la constitution de l’État pénètre tous les rapports. Ainsi lorsque Napoléon a voulu donner aux Espagnols une constitution a priori, cela a échoué. Une constitution est le travail des siècles, elle est la conscience du Rationnel dans la mesure où il est développé dans un peuple : « car on ne fabrique pas une constitution ; il faut qu’interviennent le travail des siècles, l’Idée et la conscience du rationnel, telles qu’elles se sont développées chez un peuple [16]. » Ainsi la constitution que Napoléon donna aux Espagnols était rationnelle mais ne correspondait pas à la formation du peuple. Imposer aux pays musulmans une démocratie qui fut en Europe le résultat d’un processus séculaire n’a tout simplement pas de sens.
Conclusion
Les auteurs musulmans même les plus ouverts semblent incapables de sortir d’une perspective dualiste où, entre foi et raison, religion et politique, l’un doit nécessairement définir l’autre : on sera « fondamentaliste » si on pense que c’est la foi qui domine la raison, la religion qui détermine la politique, et on sera « partisan d’un islam modéré » dans le cas contraire : tous étant d’accord sur la manière par laquelle on accomplit la volonté de Dieu, celle-ci étant interprétée par des savants puisant dans quatre ou cinq écoles de jurisprudence. Dans la mesure où c’est en dernière instance Dieu qui définit la loi, l’option « fondamentaliste » et l’option « modérée » ne sont au fond que des degrés différents d’une même approche. Peu d’auteurs musulmans affirment, comme le fait Gamal al-Banna, que « nous ne sommes pas musulmans pour nous mettre au service du fiqh, mais pour mettre le fiqh au service de la vie [17]. » "
Notes
[1] Sans mentionner les fantasmes sexuels : « Aux hommes pieux reviendra un lieu convoité, des vergers et des vignes, des Belles aux seins formés, d’une égale jeunesse et des coupes débordantes » L’Annonce, LXVIII, 31 à 33. « Les Élus jouiront de ces biens… et les fruits des jardins seront à leur portée… Dans ces jardins seront des vierges aux regards modestes que ni Homme ni Démon n’aura touchées avant eux… et ces femmes seront belles comme le rubis et le corail. » Le Bienfaiteur, LV, 54-58. « Les Précesseurs, ceux-là sont les proches du Seigneurs dans les jardins de la félicité […] sur des lits tressés s’accoudant et se faisant vis-à-vis. Parmi eux circuleront des éphèbes immortels, avec des cratères, des aiguières et des coupes d’un limpide breuvage dont ils ne seront ni entêtés, ni enivrés, avec des fruits qu’ils convoiteront. Là seront des houris aux grands yeux, semblables à la perle cachée, en conséquence de ce qu’ils faisaient sur la terre. » L’Échéance, LVI, 10-22. « Des houris, que Nous avons formées, en perfection, et que Nous avons gardées vierges, coquettes, d’égale jeunesse, appartiendront aux Compagnons de la Droite. » L’Échéance, 35-38. « Dans ces jardins, ils auront des épouses purifiées et ils y seront immortels. » La Génisse, II, 25. Il n’est pas dit ce que le petit personnel d’exécution du Paradis (vierges, houris, éphèbes et serviteurs divers) deviendront après usage. Il n’est pas dit si les « épouses purifiées » que les hommes vertueux trouveront au Paradis seront celles qu’ils avaient déjà sur terre, reconditionnées en vierges, ou d’autres. Enfin, le Coran reste très discret sur le Paradis des femmes : elles auront simplement le droit de retrouver dans l’Au-delà leur mari terrestre… et d’assister sans doute à leurs débats.
[2] Jurisprudence islamique. C’est la discipline chargée de trouver des solutions concrètes ; les lettres tentent de distinguer la volonté divine dans les différents aspects du culte et de la vie sociale. Il se distingue de la charia, qui est l’expression de la volonté divine dans sa dimension générale, dans sa sacralité immuable.
[3] Conférence donnée a l’École Nationale des Industries Minières, Rabat, le 19 février 1991.
[4] fiqh al-mouâmalaat.
[5] fiqh al-îbaadat.
[6] Mohammed Iqbal (1877-1938).
[7] Hadith 2658 dans le Sahîh de Muslim (en arabe).
[8] Cf. « Trois conférences faites aux ouvriers du val de Saint-Imier », mai 1871.
[9] Notre intention n’est pas ici de développer extensivement la théorie bakouninienne… Bakounine fera d’ailleurs une distinction entre luthériens et calvinistes, insistant sur le rôle joué par ces derniers dans le développement du capitalisme – anticipant ainsi sur les thèses de Max Weber.
[10] Notre intention n’est pas ici de développer extensivement la théorie bakouninienne… Bakounine fera d’ailleurs une distinction entre luthériens et calvinistes, insistant sur le rôle joué par ces derniers dans le développement du capitalisme – anticipant ainsi sur les thèses de Max Weber.
[11] Ibid.
[12] Dominique Urvoy, « La philosophie, entre raison et révélation », dans Les textes fondamentaux de la pensée en Islam, numéro spécial du Point, novembre-décembre 2005, p. 59.
[13] Cf : Sarah Stroumsa, Freethinkers of Medieval Islam. Ibn al-Râwandî, Abû Bakr al-Râzî and their Impact on Islamic Thought.
[14] « L’islam contre ses démons », The New York Review of Books le 29 août 2004. Traduit par Julien Charnay.
[15] Ibid.
[16] Vrin, § 274, add. p. 287.
[17] Cf. « L’islam contre ses démons », loc. cit. Gamal al-Banna était le frère du fondateur des Frères musulmans Hassan al-Banna, et critiquait durement les Frères musulmans.
- SOURCE : Monde-Nouveau - 22 septembre 2014
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