★ PRODUCTEURS ET PARASITES

Publié le par Socialisme libertaire

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« Des personnes bien pensantes, mais imbues de préjugés, osent affirmer que l'égalité entre les hommes, ne pourra jamais s'établir et encore moins exister par la raison de l'inégalité des intelligences ; est-ce que l'inégalité d'intelligence a quelque chose de commun avec l'inégalité de condition, les hommes sont des êtres de même nature et soumis aux mêmes besoins, tous ont le même droit de vivre et une égale part dans les avantages de la vie sociale.

Si l'on juge les droits d'autrui sur les siens, ne devant rien l'on ne doit rien exiger ; l'égalité entre les hommes suppose leur indépendance, ils ne se doivent qu'un appui mutuel ; tout privilège est une négation de l'égalité, une usurpation, une violence contre nature.

L'homme, enfant de la terre, ne doit être tributaire que de la sueur qui arrose le sol pour le féconder ; mais pour le malheur des travailleurs, le sol est tributaire de la conquête, le sol et tout ce qui en fait partie : artisans, ouvriers serfs, esclaves attachés au manche de l'outil ou de la charrue, comme faisant partie de l'outillage ; instrument de travail, mais non homme libre, être sans volonté à exprimer, ni droit à faire valoir, la terre que tu fouilles, tu en est déshérité, tu n'as pour égaux que les souffrants et des humiliés et devant toi des tenanciers, arbitres de ton sort ! N'ayant que tes bras pour produire, tu n'es pas maître de ta personne ; tu n'as que des devoirs, et ton travail est payé de mépris, d'ingratitude et de misère.

L'homme ne peut désirer ce qu'il ne comprend pas et encore moins vouloir ce qui lui est inconnu ; de même, il ne saurait exercer une profession, ni faire un métier qu'il n'aurait jamais appris ; et comme en toutes choses l'idée précède l'exécution, nous devons socialement en conclure que le communisme libertaire ne pourra socialement s'appliquer qu'après avoir été compris par les masses.

L'homme, comme la plante, retire sa nourriture de la terre, sans elle il ne pourrait pas exister, donc, la terre doit être à tous et à personne ; à tous pour l'embellir et la faire fructifier, à personne pour le droit de faire payer à autrui pour l'occuper ou s'en servir. Un droit qui se paye n'est pas un droit, celui qui n'a pas la liberté de produire, n'a pas le droit ou plutôt la liberté de vivre.

Le Communisme libertaire, l'Anarchie, c'est l'égalité non pas devant la loi, mais devant l'instrument de travail, devant la terre, devant tout ; chacun ayant droit aux produits ainsi qu'à toutes les découvertes scientifiques et industrielles. Tous pour chacun, chacun pour tous. Ce ne sera qu'à cette condition que l'homme aura son autonomie ; que l'organisation industrielle et agricole pourra se développer en toute liberté et dans toute sa puissance, pour satisfaire tous les besoins et empêcher qu'il y ait des meurt-la-faim au milieu de l'abondance, lorsque toutes les richesses de la terre seront en commun, chacun pourra produire dans la limite de ses forces et à sa volonté, quand il n'y aura plus de rentes, d'impôts, de fermages, de location à fournir, ni de salaires à mériter, chacun pourra consommer selon ses besoins, qui consentirait à gouverner sans impôt à recevoir, qui pourrait se dire propriétaire ou capitaliste, sans rente ni fermage, ce n'est pas le titre qui fait le maître, mais le bénéfice.

Ayons conscience de nos droits et de notre force ; déclarons hautement que la conquête a été le principe constitutif des gouvernements et des droits de propriété individuelle ; que l'esclavage et les redevances aux souverains et seigneurs, en ont été la conséquence ; que les impôts et les rentes en sont la continuation ; et qu'aussi longtemps que nous voudrons les fournir, il y aura des souffrants et des parasites, des repus et des meurt-la-faim.

De la volonté et de l'énergie ! Revendiquons ce qui nous a été soustrait, et qui, de par la loi des besoins est indispensable à tous les êtres ; la terre. Levons-nous pour la justice et disons à ceux qui nous gouvernent et détiennent les richesses sociales : nous ne voulons plus de maîtres qui nous forcent à vivre en vagabonds, en mendiants et en forçats, nous n'en voulons plus car ils nous laissent en partage la misère et l'ironique perspective de mourir à l a peine ou de faim, de se faire tuer pour défendre leurs privilèges, pour que leur race s'éteigne à jamais : guerre à eux et à leur privilèges, jusqu'à l'avènement de la radieuse anarchie. »
 

La Mistoufe - Organe communiste-anarchiste - N°1 du 5 novembre 1893. 

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