★ NATIONALISME OU ANARCHISME

Publié le par Socialisme libertaire

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NOIR & ROUGE N°7/8 (ÉTÉ/AUTOMNE 1957) 
Extrait : Nationalisme ou anarchisme 

 

« ...Au terme de cette étude quelques conclusions s’imposent :

1°)
Le nationalisme politique, économique et culturel est peut-être le phénomène le plus important, tout au moins le plus visible de la société contemporaine.

2°)
Le mouvement ouvrier n’échappe pas à la division en nations ― et les séparations verticales en nations se révèlent, en règle générale, plus fortes que les clivages horizontaux entre classes.

3°)
Les peuples évoluent parallèlement sans se connaître et l’expérience révolutionnaire internationale est très limitée.

4°)
Non seulement la solidarité effective est très réduite entre prolétariats métropolitains et peuples coloniaux, mais il n’y en a pas plus entre les peuples européens eux-mêmes. (Affaires similaires de l’Algérie et de la Hongrie).

5°)
La cause essentielle de ces entraves au développement d’une conscience et d’une vie sociale mondiales est l’existence des États-nations.

6°)
La multiplication des États-nations est un phénomène historique irréversible, c’est le choc en retour de la conquête du monde par les quelques États européens touchés les premiers par le capitalisme et l’industrialisation.

7°)
Ce phénomène est irréversible ― mais il doit être dépassé ― l’égalité effective des peuples est la condition nécessaire d’une véritable société internationale. La prolifération des États signifie que les plus grands s’affaiblissent et que les plus petits sont invivables.

8°)
Les mouvements d’émancipation nationale n’ont pas en vue la société libertaire mais sans eux elle ne pourrait se réaliser. La fédération des peuples ne peut se substituer à la juxtaposition des États qu’à la fin d’un processus général de redistribution géographique, égalitaire, des activités humaines. Processus que l’impérialisme dans ses formes anciennes ou nouvelles n’a fait qu’entraver au profit des premières de l’Europe de l’Ouest, les secondes des États-Unis et de l’URSS.

9°)
Le particularisme local n’est pas en soi une fin libertaire mais contre le monopole universel il constitue une aussi saine réaction que la révolte individuelle contre l’oppression sociale et la mystification nationale.

10°)
Il n’y a, pour nous, pas plus de peuple élu que de grande nation, que de pays de la liberté, des droits de l’homme ou du socialisme, que de la civilisation à admirer. Tout État est antilibertaire par destination, tout peuple est libertaire en acte dès qu’il se révolte, mais peut aussi rapidement cesser de l’être vis-à-vis des autres peuples dont il tolère l’exploitation.

11°)
La mystique nationale n’a qu’une puissante valeur négative et destructrice (quand elle combat l’oppression et fait éclater la domination) elle ne peut rien apporter de positif à la conscience humaine et à l’édification d’une société meilleure.

12°)
Les anarchistes ne peuvent donc prêter aux mouvements d’émancipation coloniale et nationale qu’un soutien éminemment critique. Leur tâche reste de saper à la base tout esprit national, toute mesure nationale, comme toute institution coloniale et impériale. Le rempart de l’exploitation et de l’oppression, de l’injustice et de la misère, de la haine et de l’ignorance reste l’État où qu’il apparaisse avec son cortège : Armée, Église, Parti, paralysant les hommes et les dressant les uns contre les autres par la guerre, la hiérarchie, la bureaucratie, au lieu de les unir par la coopération, la solidarité, l’entr’aide. »

Noir & Rouge 
 

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