★ Scandales

Publié le par Socialisme libertaire

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Statue de l'Émancipation, à Bridgetown (Barbade)


« Les sciences ethnologiques et anthropologiques nous permettent de supposer qu’à un moment dans l’histoire de l’humanité, les sociétés humaines se sont divisées entre maîtres et serviteurs, exploiteurs et exploités et qu’au même moment les états, les religions et la propriété sont apparus. L’extraordinaire est que des gens qui jusqu’alors vivaient dans des société sans chef, non hiérarchisées, fières et amoureuses de leurs traditions aient accepté de perdre ces caractères de liberté et d’égalité réelle qui fondaient leur authenticité.

Tout au long de l’histoire, des philosophes, des historiens ont noté ce paradoxe ; ainsi au XVIe siècle Étienne de la Boétie disait sa stupéfaction que des peuples qui possédaient le nombre, qui possédaient la force abandonnaient toute dignité et acceptaient stoïquement d’obéir à des tyrans.

C’est surtout au XVIIIe siècle que les philosophes des lumières entreprirent la critique rationnelle des fondements de l’absolutisme, de la religion et plus globalement des formes d’organisation de la société. Au fur et à mesure que l’ignorance et la servilité des peuples qui sont les piliers sur lesquels repose le pouvoir des maîtres reculait, leur critique diffusée par affiches, libelles, pamphlets et pièces de théâtre aboutit à ce que l’auréole de mystère qui entourait la personne du roi s’évanouisse comme brume au soleil.

Ceux que l’on ne pouvait approcher qu’à genoux, que l’on ne pouvait regarder qu’en courbant la tête parce qu’ils se prétendaient « élus de dieu », ces rois, ces nobles ces curés perdirent alors tout leur prestige et apparurent au grand jour comme de misérables exploiteurs. Les scandales de la cour, les gabegies extraordinaires des nobles et des curés de cour, le luxe extraordinaire de Versailles apparut au grand jour. Le peuple mourait de faim pendant que des spéculateurs s’enrichissaient à ses dépens. Le scandale était énorme, la révolution de 1789 éclata, la république fut proclamée.

Cette dernière affichât aux frontons des mairies la liberté, l’égalité et la fraternité pour tous ; le peuple allait choisir ses maîtres et ces derniers en bons citoyens se comporteraient comme des agneaux, purs et respectueux des lois, pour tout dire transparents. Ces belles intentions ne firent pas illusion très longtemps ; tous les gouvernements qui se sont succédé depuis plus d’un siècle ont eu leur lot de scandales, tous plus énormes et graveleux les uns que les autres.

De Dreyfus à Panama, la liste est très, très longue. A chaque fois pour marquer sa désapprobation et punir les coupables, le peuple élit une nouvelle équipe (les prétendants ne manquent pas !) qui promet d’être honnête, sincère… et c’est comme çà depuis que la république existe. Alors on promulgue des lois censées encadrer les agissements des élus, on met en place des commissions pour les contrôler et la justice nous dit on sanctionnera les abus mais ceux qui font les lois ont tous les éléments pour les violer, les contourner, ils connaissent ceux qui sont dans les commissions et la justice qui en quelques minutes peut envoyer moisir en prison un voleur de poules ou un gamin de banlieue mettra des années pour condamner à une amende l’ex-élu coupable d’avoir détourné une fortune aux dépens du contribuable.

Rien de révolutionnaire dans ces affirmations, déjà au XVIIe siècle, le fabuliste jean de la Fontaine disait la même chose en vers. Au temps du « roi soleil » ou en république, le pouvoir, l’argent, la volonté de puissance obsèdent pareillement les individus, les rend carrément fous prêts à prendre tous les risques pour parvenir. Il n’est nous dit Elisée Reclus « geôlier qui ne tourne sa clef dans la serrure avec un sentiment glorieux de sa toute-puissance, d’infime garde-champêtre qui ne surveille la propriété des maîtres avec une haine sans bornes contre le maraudeur ; misérable huissier qui n’éprouve un souverain mépris pour le pauvre diable auquel il fait sommation ».

Et si les simples citoyens sont sensibles aux attraits de l’argent et du pouvoir au point d’oublier les valeurs de solidarité, d’entraide , de camaraderie, combien est-ce plus vrai des hommes politiques qui vouent toute leur vie à la conquête du pouvoir et des honneurs, qui de ce simple fait se croient supérieurs, et nourrissent à l’endroit des simples citoyens un sentiment de mépris. Rien d’étonnant donc, si en ce début de XXIe siècle tous les médias décrivent à longueur de journée les malversations et les comportements honteux d’hommes ou de femmes politiques, gouvernants ou prétendants au pouvoir.

Quelque soit l’idéologie affichée, ils souffrent tous du même mal, leur tête gonfle à mesure que la perspective du pouvoir se rapproche, ils perdent tout contact avec la réalité. Les peuples sont stupides de confier leur sort depuis des siècles à ces bateleurs et c’est une pure utopie que de penser qu’en changeant simplement quelques règles, on pourrait éviter les scandales. Non, la seule manière pour en finir avec la corruption est de supprimer la cause, c’est à dire le pouvoir A nous d’en tirer les conséquences et de prendre notre destin en main. »

 

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