★ On ne peut pas améliorer les prisons
★ Extraits d’une conférence que Kropotkine fit à Paris,
salle Rivoli, le 20 décembre 1887.
« Ayant eu l’occasion de faire connaissance avec deux prisons en France et quelques-unes en Russie ; ayant été amené par diverses circonstances de ma vie à revenir, à plusieurs reprises, sur l’étude des questions pénitentiaires, j’ai pensé qu’il était de mon devoir de venir dire au grand jour ce que sont les prisons, de relater mes observations et d’exposer les réflexions suggérées par ces observations.
Et d’abord, en quoi consiste le régime des prisons françaises ?
Vous savez qu’il y trois grandes catégories de prisons : la prison départementale, la maison centrale et la Nouvelle-Calédonie.
Pour la Nouvelle-Calédonie, les renseignements qui nous parviennent de ces îles éloignées sont si contradictoires et si fragmentaires qu’il est impossible de se faire une juste idée de ce que c’est que le régime des travaux forcés de la Nouvelle-Calédonie.
Pour les prisons départementales, celle que nous avons appris à connaître à Lyon est dans un tel état que moins on en parlera, mieux cela vaudra. J’ai raconté ailleurs en quel état nous l’avons trouvée et l’influence funeste qu’elle exerce sur les enfants qui y sont enfermés. Ces êtres malheureux sont condamnés, à la suite du régime auquel ils sont soumis, à traîner toute leur vie de prison en prison, et à mourir dans une île du Pacifique.
Je ne m’arrête donc pas sur la prison départementale de Lyon et je passe à la maison centrale de Clairvaux, d’autant plus qu’avec la prison militaire de Brest, c’est la meilleure prison de France et — autant qu’on peut en juger par ce que l’on sait sur d’autres pays, — une des meilleures d’Europe. Voyons ce que c’est qu’une des meilleures prisons modernes, — nous pourrons mieux juger les autres. Nous l’avons vue aussi dans les meilleures conditions. Quelques temps avant notre arrivée, un détenu avait été tué dans sa cellule par les gardiens, avec leurs clés ; après quoi toute l’administration avait été changée ; et je dois dire franchement que la nouvelle administration n’avait nullement ce caractère que l’on rencontre dans tant d’autres prisons — celui de chercher à rendre la vie du détenu la plus dure possible. C’est aussi la seule prison en France qui n’ait pas eu son émeute, lors des émeutes de l’année 1885.
Clairvaux
Lorsqu’on s’approche de l’immense mur d’enceinte de Clairvaux, qui longe les pentes des collines sur une longueur de quatre kilomètres, on croirait plutôt voir une petite ville manufacturière. Des usines fumantes, quatre grandes cheminées de machines à vapeur, une ou deux turbines et le rythme scandé des usines, voilà ce qui frappe au premier abord. C’est que, pour trouver de l’occupation pour 1400 détenus, il a fallu y ériger une immense usine de lits en fer, des manufactures de soie et de brocart de haute qualité, de toile grossière pour plusieurs autres prisons françaises, de gros draps, de vêtements et de sabots pour les détenus, une usine de mètres et de cadres, une usine à gaz, des moulins à farine, une manufacture de boutons et de toutes sortes de petits objets en nacre, et ainsi de suite. Un immense potager et des champs d’avoine sont cultivés à l’intérieur des murs d’enceinte, et de temps en temps une brigade extérieure sort des murs, soit pour couper du bois dans la forêt, soit pour réparer un canal.
Voilà l’immense mise de fonds et la variété de métiers qu’il a fallu introduire pour donner du travail utile à 1 400 hommes seulement.
L’État étant incapable de faire cette mise de fonds immense, ni d’écouler avantageusement ce qu’il pourrait faire produire, a évidemment dû s’adresser à des entrepreneurs, et pour attirer ces entrepreneurs il leur concède le travail des détenus à des prix beaucoup inférieurs à ceux que l’on paie en dehors de la prison.
En effet, les salaires de Clairvaux ne sont que de cinquante centimes à un franc. Tandis qu’aux lits de fer ou à l’atelier de confection, on parvient quelquefois à gagner jusqu’à deux francs, nombre de détenus ne gagnent que soixante-dix centimes pour une journée de douze heures de travail, et souvent cinquante centimes. Là-dessus l’État prélève de cinq à neuf dixièmes — cinq dixièmes chez celui qui est condamné pour la première fois, six dixièmes lors d’une deuxième condamnation, et ainsi de suite ; un dixième reste toujours au détenu, quel que soit le nombre de condamnations. Le reste est divisé en deux parties égales, dont l’une est mise à la disposition du détenu pour acheter à la cantine quelque nourriture supplémentaire, et l’autre moitié lui est remise à sa sortie.
C’est aux ateliers que les détenus passent la plupart de la journée, sauf une heure d’école et trois quarts d’heure de promenade, à la file, aux cris de une, deusse, des gardiens. Cela s’appelle faire la « queue de cervelas ». Le dimanche est passé dans les cours, s’il fait beau, et dans les ateliers en cas de mauvais temps.
Ajoutons encore que la maison centrale de Clairvaux était organisée sur le système du silence absolu. Mais ce système est si contraire à la nature humaine qu’il ne pouvait être maintenu qu’à force de punitions. Aussi, pendant les trois années que nous avons passées à Clairvaux, tombait-il en désuétude. On l’abandonnait peu à peu, pourvu que les conversations à l’atelier et à la promenade ne fussent pas trop bruyantes.
Il y aurait bien des choses à dire sur cette « Maison de détention et de correction » mais ces quelques mots suffiront pour vous en donner un idée générale.
Quant aux prisons des autres pays européens, qu’il me suffise de dire qu’elles ne sont pas meilleures que celle de Clairvaux. Dans les prisons anglaises, en tant que je les ai étudiées dans la littérature, dans des rapports officiels et dans des mémoires, je dois dire qu’elles ont maintenu certains usages qui ont été heureusement abolis en France. Le traitement en France est plus humain, et le « tread-mill » — la roue dans laquelle le détenu anglais marche comme un écureuil — n’existe pas en France. Tandis que, d’autre part, la punition française qui consiste à faire marcher l’homme pendant des mois, — par son caractère dégradant, la prolongation démesurée du châtiment et l’arbitraire avec lequel il est appliqué est un digne pendant de la peine corporelle que l’on rencontre encore en Angleterre.
Les prisons allemandes ont un caractère de dureté qui les rend excessivement pénibles, et quant aux prisons autrichiennes et russes, elles sont dans un état encore plus déplorable.
Nous pouvons donc prendre la maison centrale en France comme un représentant assez bon de la prison modernisée.
Voilà, en peu de mots, le système d’organisation des prisons que l’on considère comme les meilleures en ce moment. Voyons maintenant quels sont les résultats obtenus par ces organisations excessivement coûteuses ?
De beaux résultats
A cette question, il n’y a pas deux réponses à faire. Tous, l’administration même, sont d’avis que ces résultats sont des plus piteux.
Une fois qu’un homme a été en prison, il y reviendra. C’est certain, c’est inévitable, et les chiffres le prouvent. Les comptes rendus annuels de l’administration de la justice criminelle en France nous disent que la moitié environ de tous ceux qui sont jugés par les assises, et les deux cinquièmes de ceux qui passent chaque année en police correctionnelle ont reçu leur éducation en prison : ce sont des récidivistes. Presque la moitié (42 à 45 pour cent) de tous ceux qui sont jugés pour vols, sont encore des récidivistes. On en arrête jusqu’à 70 000 par an en France seulement. Quant aux maisons centrales, plus d’un tiers (20 à 40 pour cent) des détenus libérés de ces prétendues institutions de correction sont réintégrés en prison dans le cours des douze mois qui suivent leur libération. C’est un fait si constant qu’à Clairvaux nous entendions dire aux gardiens :
« Tiens, c’est étrange qu’un tel ne soit pas encore de retour. Aurait-il eu, par hasard, le temps de passer dans un autre district judiciaire ? »
Et il y a dans les maisons centrales des prisonniers âgés qui, ayant réussi à avoir une place favorisée à l’hôpital ou dans un atelier, prient, en sortant de prison, de leur garder leur place jusqu’à leur prochain retour. Ces pauvres vieux sont sûrs d’y retourner sous peu.
D’ailleurs, ceux qui s’y connaissent — et je n’ai qu’à citer, par exemple, le docteur Lombroso, affirment que si l’on tient compte de ceux qui meurent bientôt après être sortis de prison, qui changent de nom, ou émigrent, ou qui réussissent à se cacher après avoir commis quelque nouvel acte contre les lois établies — si l’on tient compte de tous ceux-là, on est à se demander si tous les détenus libérés ne tombent pas dans la récidive.
Relégation
Voilà à quoi aboutissent nos prisons. Mais il y a plus. Le fait pour lequel un homme revient en prison est toujours plus grave que celui pour lequel il avait été condamné la première fois. Si son premier acte a été un petit vol, il reviendra pour quelque grand coup. S’il a été emprisonné, la première fois, pour un acte de violence, souvent il reviendra assassin. Tous les écrivains criminalistes sont d’accord là-dessus.
La récidive est devenue un immense problème pour l’Europe, et vous savez comment la France l’a résolu. Elle a ordonné l’extermination des récidivistes en bloc, par les fièvres de Cayenne. D’ailleurs l’extermination commence déjà en route. Vous avez lu, il y a trois jours, comment on a passé par les armes onze récidivistes à bord du vaisseau qui les emmenait de France, et cet acte de sauvagerie du capitaine sera certainement son titre pour être nommé prochainement directeur de la colonie de Cayenne.
Eh bien, malgré toutes les réformes faites jusqu’à ce jour, malgré tous les systèmes pénitentiaires essayés, le résultat a toujours été le même. D’une part, le nombre de faits contraires aux lois existantes n’augmente ni ne diminue, quel que soit le système de peines infligées. On a abolit le « knout » en Russie et la peine de mort en Italie — et le nombre des meurtres est resté absolument le même. La cruauté des juges augmente ou diminue : la cruauté ou le jésuitisme des systèmes pénitentiaires changent. Mais le nombre d’actes nommés crimes reste invariable. Il est affecté seulement par d’autres causes, dont je vais parler tout à l’heure.
Et d’autre part, quels que soient les changements introduits dans le régime pénitentiaire, la récidive ne diminue pas. Et c’est inévitable, cela doit être ainsi : la prison tue en l’homme toutes les qualités qui le rendent mieux approprié à la vie en société. Elle en fait un être qui fatalement devra revenir en prison et qui finira ses jours dans un de ces tombeaux en pierre sur lesquels on inscrit Maison de détention et de correction et que les geôliers eux-mêmes appellent « Maison de corruption ».
Si on me demandait — « Que pourrait-on faire cependant pour améliorer le régime pénitentiaire ? » je répondrais : Rien ! On ne peut pas améliorer une prison. Sauf quelques petites améliorations sans importance, il n’y a absolument rien à faire qu’à la démolir.
J’ai déjà dit pour quel salaire dérisoire travaille le prisonnier. Dans ces conditions, le travail — qui déjà n’a aucun attrait en lui-même parce qu’il n’exerce aucune des facultés mentales du travailleur — est si mal rétribué qu’il arrive à être considéré comme une punition. Quand mes amis anarchistes à Clairvaux faisaient des corsets ou des boutons de nacre et recevaient douze sous pour dix heures de travail, dont quatre sous étaient retenus par l’État (de cinq à neuf sous sur dix chez les prisonniers de droit commun), nous comprenions très bien le dégoût que ce travail devait inspirer à un homme condamné à le faire. Quel plaisir trouver dans un pareil labeur ? Quel effet moralisant ce travail peut-il exercer, lorsque le prisonnier se répète continuellement qu’il ne travaille que pour enrichir un patron ! Quand il a reçu trente-six sous à la fin de la semaine il s’écrie avec raison :
« Décidément, les vrais voleurs sont ceux qui nous tiennent ici et pas nous ».
Une vie sans objet
Mais encore, nos camarades n’étaient pas forcés de travailler, et quelquefois par un travail assidu ils arrivaient à encaisser vingt sous. Mais ils faisaient ainsi parce que quelque chose les poussait à travailler. Ceux qui étaient mariés étaient en correspondance suivie avec leur femme, le lien qui reliait le prisonnier à sa famille n’était pas rompu. Et ceux qui n’étaient pas mariés, ou n’avaient pas de mère à soutenir, avaient une passion : l’étude, et ils travaillaient à leur nacre dans l’espoir de pouvoir s’acheter à la fin du mois un livre depuis longtemps désiré. Car, où donc, si ce n’est en prison, le travailleur a-t-il le loisir pour l’étude ?
Ils avaient une passion. Mais quelle passion peut inspirer un prisonnier de droit commun, privé de tout lien qui puisse le rattacher à la vie extérieure ? Par un raffinement de cruauté, ceux qui ont imaginé nos prisons ont fait tout ce qu’ils ont pu pour interrompre toute relation du prisonnier avec la société. En Angleterre, sa femme et ses enfants ne peuvent le voir qu’une fois tous les trois mois, et les lettres qu’il peut écrire sont de vraies dérisions. Les philanthropes ont même quelque fois poussé le mépris de la nature humaine jusqu’à ne permettre au détenu que d’apposer sa signature au bas d’une circulaire imprimée.
Dans les prisons françaises, les visites des parents ne sont pas si sévèrement limitées, et dans les prisons centrales le directeur est même autorisé dans des cas exceptionnels à permettre les visites dans un parloir sans grille. Mais les maisons centrales sont loin des grandes villes et ce sont les grandes villes qui fournissent le plus grand nombre de détenus. Très peu de femmes ont les moyens de faire le voyage de Clairvaux pour avoir quelques petites entrevues avec leur mari.
Et ainsi la meilleure influence à laquelle le détenu pourrait être soumis, la seule qui pourrait apporter un rayon de lumière, un élément plus doux dans sa vie — les relations avec ses proches — est systématiquement écartée. Les prisons de l’ancien temps étaient moins propres, moins ordonnées que celles d’aujourd’hui, mais elles étaient plus humaines.
J’ai déjà dit qu’au moment où nous arrivâmes à Clairvaux, l’administration y avait été changée, et que des relations, meilleures que dans d’autres prisons françaises s’étaient établies entre la nouvelle administration et les détenus. Mais les hommes n’y peuvent rien. Le système lui-même est odieux.
Qu’on en juge d’après le système suivant de punition que nous trouvâmes à Clairvaux. Je l’ai décrit alors, la description fit le tour de la presse française, et personne n’en a jamais contesté un seul mot.
Le quartier de punition, disais-je, c’est le quartier cellulaire. Un homme qui y est envoyé n’est pas battu ; il n’est pas assommé. Nous, nous sommes des civilisés. Un homme puni est simplement enfermé dans une cellule. En hiver, il y fait un froid glacial, et la cellule n’a ni lit, ni banquette, ni lumière artificielle. Pour la nuit on lui donne un matelas et, en échange, il doit ôter tous ses habits et les mettre à la porte de sa cellule. Le pain et l’eau sont sa seule nourriture.
Le matin, dès que la cloche de la prison a sonné — à cinq ou six heures en été, à sept ou huit heures en hiver, on l’emmène dans un hangar, et là il doit marcher. Rien que marcher ! mais même d’un exercice aussi naturel nous avons su faire une torture.
Les punis marchent à la file, en sabots, aux cris mesurés du gardien : « une, deusse ! » Cela dure vingt minutes, après quoi — le repos : « Asseyez- vous ! » Chacun s’assoit sur sa borne numérotée. Tous doivent rester immobiles. Cela dure dix minutes, après quoi de nouveau : « En marche ! — Une, deusse — une, deusse ! » encore pour vingt minutes… Et comme cela toute la journée, douze, treize, quatorze heures par jour, tant que les machines travaillent dans les ateliers de la prison. Et cela, pendant des mois, quelquefois des années !
Malheur au puni, si le moindre signe d’impatience lui échappe ! Il sera alors un insoumis. Il est tout naturel, sans doute, qu’il se développe un esprit de corps qui fait qu’un insoumis est la bête noire de tous les gardiens. La première question que les gardiens de la prison font à ceux qui leur amènent un nouveau détenu, c’est de savoir ce qu’il est, et malheur à lui, si le mot insoumis a été prononcé. Il ne sortira pas de si tôt, à moins d’être transporté à la Nouvelle-Calédonie, ou porté au cimetière de Clairvaux.
Gardiens et détenus
Il est facile d’écrire dans les journaux que les gardiens devraient être sévèrement surveillés, que les directeurs devraient être choisis parmi les braves gens. Rien de plus facile que de bâtir des utopies administratives. Mais l’homme restera l’homme, le gardien comme le détenu. Et quand des hommes sont condamnés à rester toute leur vie dans des situations fausses, ils en subiront les conséquences. Le gardien devient méticuleux. Nulle part, sauf dans les monastères et les couvents, il ne règne un esprit de basse intrigue et de cancan si développé que parmi les gardiens de prison. Forcés de se mouvoir dans un milieu vulgaire, les fonctionnaires subissent son influence. Des petits cancans, un mot prononcé par untel, forment le fond de leurs conversations. Les hommes sont les hommes, et vous ne pouvez pas donner à un individu une parcelle d’autorité sans le corrompre. Il en abusera, et il y mettra d’autant moins de scrupule, il fera sentir d’autant mieux son autorité, que sa sphère sera plus limitée. Forcés de vivre au milieu d’un camp d’ennemis, les gardiens ne peuvent pas être des modèles de gentillesse et d’humanité. A la ligne des détenus, ils opposent la ligne des geôliers. C’est l’institution qui les rend ce qu’ils sont, des persécuteurs petits et mesquins. Mettez un Pestalozzi (créateur de la pédagogie moderne) à leur place (si tant est qu’un Pestalozzi accepte la fonction) et il deviendra bientôt un garde-chiourme.
Quels gredins !
Rapidement la rancune contre la société envahit le cœur du détenu. Il s’habitue à haïr cordialement tous ceux qui l’oppriment. Il divise le monde en deux parties : celle dont lui et ses camarades font partie, et le monde extérieur, représenté par le directeur, les gardiens et les employés. Une ligne se forme entre tous les détenus contre tous ceux qui ne portent pas l’habillement des prisonniers. Ce sont leurs ennemis, et tout ce qu’on peut faire pour les tromper est bien. Aussitôt libéré, le détenu met sa morale en pratique. Avant la prison, il pouvait commettre des méfaits sans réflexion, maintenant il a une philosophie à lui, qui peut se résumer dans ces mots de Zola :
« Quels gredins que les honnêtes gens ! »
Si nous prenons en considération toutes les diverses influences de la prison sur le détenu, nous devons convenir que, chacune séparément, et toutes ensembles, elles agissent de manière à rendre l’homme qui a passé quelque temps en prison de moins en moins approprié à la vie en société. D’un autre côté, aucune de ces influences n’agit dans le sens d’élever les facultés intellectuelles et morales de l’homme, de l’amener à une conception supérieure de la vie, de le rendre meilleur qu’il n’était en entrant.
La prison n’améliore pas les détenus. Et d’autre part, nous l’avons vu, elle n’empêche pas les ci-nommés crimes de se commettre : témoins, les récidivistes. Elle ne répond donc à aucun des buts qu’elle se propose d’atteindre.
Voilà pourquoi la question vient à se poser :
« Que faire donc avec ceux qui méconnaissent la loi — je ne dis pas la loi écrite. Celle-ci n’est qu’un triste héritage d’un triste passé, mais les principes mêmes de moralité gravés dans le cœur de chacun ? »
C’est la question que notre siècle doit résoudre. »
Piotr Alexeïevitch Kropotkine
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