★ PAR-DELÀ LE BIEN ET LE MAL

★ ARTICLE EXTRAIT DU MONDE LIBERTAIRE N°1826 DE MARS 2021.  
 

« Éthique, morale, valeurs, principes… Il est des mots qui ont été tellement galvaudés et conjugués à toutes les sauces que le bon sens incite à les manier avec précaution. Mais, est-ce cependant à dire que les différentes conceptions de l’éthique, de la morale, des valeurs, des principes… se valent ? Ou, ce qui revient au même, qu’elles ne valent pas grand-chose ?

Si on s’en réfère au fait que tous ces concepts prêtent le flanc à interprétations diverses fluctuant avec le temps et les circonstances, on est tenté de les mettre tous dans le même sac et… Mais, ce faisant, ne serait-ce pas jeter le bébé de leurs prétentions à l’universel d’un distinguo entre le bien et le mal, avec l’eau marécageuse du bain où ils s’ébrouent ? Et puis, quand même, s’il est des conceptions (racistes, sexistes, pro loi du plus fort et de l’exploitation et de l’oppression des plus faibles…) qui sont à vomir ou qui suintent l’hypocrisie par tous leurs pores (les religieuses sans exception aucune), il en est d’autres (les humanistes et progressistes au sens large) qui ne méritent pas d’être confondues avec les susnommées précédentes.

Pourquoi, comment… ? L’être humain, et c’est cela qui est UNIVERSEL, a toujours eu besoin d’éthique, de morale, de valeurs, de principes… et de distinguer entre le BIEN et le MAL. Alors, si on pense que toutes les conceptions de l’éthique et de la morale ne se valent pas, doit-on, simplement, aller à la pêche de l’oiseau rare libertaire ou révolutionnaire ? C’est tentant. Mais, ce faisant, ne s’inscrit-on pas alors dans une démarche identitariste avec querelles de clocher, voire sectarisme à la clef ? Et puis, si tant est que l’oiseau rare existe, pourquoi a-t-il échoué à s’imposer sur le « marché » ? L’éternelle faute des autres n’explique peut-être pas tout ?

Bref, sans vouloir offenser qui que ce soit, j’ai la faiblesse de penser que vouloir à tout prix définir et graver dans le marbre du sacré la vérité avec un grand V en matière d’éthique et de morale relève de l’impasse. Tout simplement parce qu’on ne peut que TENDRE vers ce rêve universel d’une éthique et d’une morale faisant autorité d’elle-même. Et, cette recherche permanente ne peut se mener que collectivement. Bien sûr, pas avec n’importe qui, mais avec d’autres, différents mais proches. Une chose, cependant, ne saurait être négociable. Celle d’une recherche sans lien systématique avec les conditions de son application. En clair, sans lien systémique entre la théorie et la pratique.

Fi, donc, des querelles théologiques hors-sol. Au début comme à la fin c’est à ses actes que se jaugent et se jugent une éthique, une morale, des valeurs…

Difficile d’être plus clair ! »
 

Jean-Marc Raynaud
 

• SOURCE : Le Monde Libertaire