★ Le minimum de la vie
★ Le minimum de la vie (1954).
Auteur·e·s : BERNSTEIN Michèle I, CONORD André-Frank, DAHOU Mohamed, Debord Guy, FILLON Jacques, WOLMAN Gil J
« On ne dira jamais assez que les revendications actuelles du syndicalisme sont condamnées à l'échec ; moins par la division et la dépendance de ces organismes reconnus que par l'indigence des programmes.
On ne dira jamais assez aux travailleurs exploités qu'il s'agit de leurs vies irremplaçables où tout pourrait être fait ; qu'il s'agit de leurs plus belles années qui passent, sans aucune joie valable, sans même avoir pris les armes.
Il ne faut pas demander que l'on assure ou que l'on élève le « minimum vital », mais que l'on renonce à maintenir les foules au minimum de la vie. Il ne faut pas demander seulement du pain, mais des jeux.
Dans le « statut économique du manœuvre léger », défini l'année dernière par la Commission des conventions collectives, statut qui est une insupportable injure à tout ce que l'on peut encore attendre de l'homme, la part des loisirs — et de la culture — est fixée à un roman policier de la Série Noire par mois.
Pas d'autre évasion.
Et de plus, par son roman policier, comme par sa Presse ou son Cinéma d'Outre-Atlantique, le régime étend ses prisons, dans lesquelles il ne reste rien à gagner — mais rien à perdre que ses chaînes.
La vie est à gagner au-delà.
Ce n'est pas la question des augmentations de salaires qu'il faut poser, mais celles de la condition faite au peuple en Occident.
Il faut refuser de lutter à l'intérieur du système pour obtenir des concessions de détail immédiatement remises en cause ou regagnées ailleurs par le capitalisme. C'est le problème de la survivance ou de la destruction de ce système qui doit être radicalement posé.
Il ne faut pas parler des ententes possibles, mais des réalités inacceptables : demandez aux ouvriers algériens de la Régie Renault où sont leurs loisirs, et leur pays, et leur dignité, et leurs femmes ? Demandez-leur quel peut être leur espoir ? La lutte sociale ne doit pas être bureaucratique, mais passionnée. Pour juger les désastreux résultats du syndicalisme professionnel, il suffit d'analyser les grèves spontanées d'août 1953 ; la résolution de la base ; le sabotage par les centrales jaunes : l'abandon par la C.G.T. qui n'a su ni provoquer la grève générale ni l'utiliser alors qu'elle s'étendait victorieusement. Il faut, au contraire, prendre conscience de quelques faits qui peuvent passionner le débat : le fait par exemple que partout dans le monde nos amis existent, et que nous nous reconnaissons dans leur combat. Le fait aussi que la vie passe, et que nous n'attendons pas de compensations, hors celles que nous devons inventer et bâtir nous-mêmes.
Ce n'est qu'une affaire de courage. »
Pour l'Internationale lettriste :
MICHÈLE I. BERNSTEIN, ANDRÉ-FRANK CONORD, MOHAMED DAHOU, G.-E. DEBORD, JACQUES FILLON, GIL J WOLMAN.
Potlatch N°4 - 13 juillet 1954
★ SOURCES :
Aux origines de l'esprit de Mai 68: l'histoire tumultueuse de l'Internationale lettriste
Peu connue, l'Internationale lettriste a largement contribué, au cœur des années 1950, à faire émerger l'esprit frondeur et anarchiste de Mai 68. "La Tribu" de Jean-Michel Mension (éd. Allia)...
Aux origines de l’esprit de Mai-68: l'histoire tumultueuse de l'Internationale lettriste.
l'Internationale lettriste, POTLATCH 1954-1957
Une bibliothèque numérique unique et originale dans le monde francophone en sciences sociales et humaines, développée en collaboration avec l'Université du Québec à Chicoutimi, fondée et di...
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L'Internationale lettriste.
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