★ À bas le politique !
Je ne craindrai pas d’exprimer cette conviction, que si demain on établissait un gouvernement et un conseil législatif, un parlement, exclusivement composé d’ouvriers, ces ouvriers, qui sont aujourd’hui de fermes démocrates socialistes, deviendraient après-demain des aristocrates déterminés, des adorateurs hardis ou timides du principe d’autorité, des oppresseurs et des exploiteurs. Ma conclusion est celle-ci : il faut abolir complètement, dans le principe et dans les faits, tout ce qui s’appelle pouvoir politique ; parce que tant que le pouvoir politique existera, il y aura des dominants et des dominés, des maîtres et des esclaves, des exploiteurs et des exploités.
« Nous ne voulons pas que vous nous tendiez la main,
nous voulons juste que vous ôtiez vos sales pattes. »
— Femmes de l’organisation Jojoca au Mexique, à l’adresse du gouverneur et du maire.
" LE SYSTÈME ÉLECTORAL A TOUJOURS SERVI À LA SOUMISSION.
Le premier président élu en France a sonné définitivement le glas de la révolution de 1848, mettant fin aux espérances d’une république sociale et démocratique, et il s’est rapidement intronisé Empereur. Basé sur la propriété, le travail, la famille et l’ordre public, le régime de Louis-Napoléon Bonaparte avait alors les mains libres pour développer l’exploitation capitaliste. La République suivante renouait avec le massacre des espérances et des révolté-e-s en brisant la Commune de Paris en 1871. La Vème République est quant à elle apparue dans les conditions d’un putsch, mettant à sa tête un général nommé pour maintenir l’ordre et conserver l’Algérie française.
Leurs démocraties sont des régimes bourgeois et conservateurs, dans lesquels la liberté, l’égalité et l’entraide ne sont que des inscriptions sur les frontons des palais. Elles sont le gouvernement du peuple, offrant un simulacre de liberté sous surveillance, sans toucher aux bases de l’exploitation et de la domination : l’argent, la propriété, l’Etat, le capital, les frontières, le patriarcat. Comme les monarchies et les dictatures, elles partagent l’idée qu’il faut des chefs, que ce soit à l’échelle d’un pays, au travail, à l’école, dans la famille. Nous pensons au contraire que nous sommes capables de nous organiser sans chefs, ni hiérarchie, et que surtout un grand nombre de nos problèmes vient du fait qu’il existe des gouvernant-e-s et des gouverné-e-s.
Au-delà des habitudes autoritaires, des coups politiciens et des affaires, la politique a toujours poussé à la délégation du pouvoir et à la récupération. Elle entend organiser la vie sociale à travers un contrat surplombant, en réalité décidé par quelques uns et quelques unes, ou à travers l’aspiration à une volonté générale qui n’existe pas et ne peut qu’homogénéiser les gens plutôt que de laisser libre cours à la diversité de la vie.
Nous ne visons pas à faire entendre nos doléances à un quelconque chef, nous ne visons pas non plus à prendre le pouvoir. Nous ne voulons ni chefs ni hiérarchie, mais vivre sans diriger, ni être dirigé-e-s. C’est pourquoi nous participerons à perturber aussi bien le jeu électoral que la routine de l’exploitation et de la domination dans cette période, par l’auto-organisation et l’action directe.
Si nous refusons de nous incarner dans un quelconque pouvoir politique, qu’il soit alternatif ou de transition, c’est parce que nous savons que le pouvoir pervertit. Le problème n’est pas seulement qui sont les chefs ni ce qu’ils font de leur pouvoir, mais qu’il y ait des chefs et qu’ils dirigent. Même le révolutionnaire le plus honnête pourrait finir tyran s’il est mis en position de diriger.
C’est pourquoi nous ne serons pas des luttes politiques, qu’elles visent à participer au jeu électoral ou qu’elles le contestent sans s’opposer clairement à la représentation et la délégation du pouvoir, sans chercher à détruire tout pouvoir politique. Nous refusons de céder à l’ère du temps, poussant à la composition avec des représentants et représentantes d’organisations réformistes, à la dissimulation volontaire du discours de rupture pour attirer le plus de gens possible, et toutes les pratiques dociles à l’époque. Ce vers quoi nous tendons, c’est à la révolution sociale.
La révolution est une transformation profonde des structures sociales. Elle n’en reste pas à des bouleversements purement politiques, où il n’y aurait que des droits formels à gagner. Elle vise à changer la vie sociale en désorganisant tout le système économique et politique actuel, notamment par la grève, l’expropriation et le sabotage, et en démolissant son fidèle gardien : l’État. Si la délégation nourrit la hiérarchie, alors l’absence de chef est un état social sans gouvernant-e-s et gouverné-e-s, où les accords et les règles ne sont pas figés mais définis librement et réciproquement au sein de structures souples. Les gens font alors la révolution pour eux et elles-mêmes, et non pour un Parti, des intellectuels ou des bourgeois.
Pas plus qu’une ville, une révolution ne se dirige et ne se planifie. Elle ne se décrète pas non plus, sans pour autant surgir de nulle part. Nous entendons bien participer à ouvrir des brèches et des possibilités, sans attendre et sans savoir exactement où cela nous mènera. Ce qui pourrait passer pour du purisme ou une adhésion sacrificielle à une doctrine n’est qu’une façon d’être pleinement en vie sans se soumettre à l’époque. La liberté n’est pas une vue de l’esprit. Elle s’éprouve dès maintenant, dans les luttes et les révoltes contre l’existant.
GRÈVE DES ÉLECTEURS ET DES ÉLECTRICES,
SABOTAGE DU SYSTÈME ÉLECTORAL ! "
Assemblée autonome, Caen, avril 2017
assembleeautonome.caen(a)riseup.net
- SOURCE : Bibliothèque Anarchiste
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