★ E. Armand : Le Travail (1908)
★ E. Armand, “Le Travail” (1908)
« S’en aller, le matin, dès l’aurore, à l’usine
Puis s’atteler, ainsi qu’une inerte machine
A quelque dur labeur qui ne change jamais,
Répéter tel un rite ennuyeux — comme un faix
Ecrasant qu’on ne peut jeter bas — une lâche,
La semblable toujours. Se tenir humble, lâche,
Devant l’arrogant chef dont l’impérieuse voix
Ordonne et qui veut être écoutée. Point de choix :
Obéir ou partir. La besogne est stérile.
N’importe, raisonner ici n’est point utile ;
Logique, réflexion sont des dons superflus
Pour produire on est là. Rien d’autre. Rien de plus,
C’est à dire enrichir un possédant avide
Dont l’intérêt brutal est le but et le guide.
Onze heures d’un enfer qu’ignore Dante ! En vain
Vous connaissez que cinq peut-être au genre humain
Suffiraient, pour régler des besoins d’équilibre,
En vain d’indignation rempli, votre cœur vibre
Il faut se taire. Et quoi c’est travailler cela ?
Vous êtes fous ! De la prostitution ! Voilà
Ce que c’est ! Une chaine, un boulet, une entrave
Qui rive au sol, qui rend pire encore que l’esclave.
Mou, veule, invertébré, l’on glisse vers la mort
Et qui demeure soi parmi les forts est fort. »
E. Armand, in L’Anarchie no. 147 (30 janvier 1908)
- SOURCE : The Libertarian Labyrinth
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