★ Et l’bon Dieu dans la merde, nom de Dieu !
★ " Et l’bon Dieu dans la merde, nom de Dieu ! "
in Courant alternatif N° 285 décembre 2018.
« L’élection du pape François avait été saluée par les médias, sa personnalité étant jugée susceptible de rendre le Vatican moins rigide sur le plan des mœurs. Mais le « bon pontife » se montre tout aussi réac que ses prédécesseurs, et le côté obscur de l’Église catholique est ressorti avec sa « gestion » des énormes scandales liés à la pédophilie de prêtres qui ont éclaté dans de nombreux pays depuis le début du siècle. Elle reste un des principaux agents de l’ordre patriarcal, à dénoncer et combattre !
Et l’bon Dieu dans la merde, nom de Dieu !
Le Vatican est connu pour son intransigeance concernant l’acte sexuel : celui-ci doit s’inscrire strictement dans le cadre du mariage, de l’hétérosexualité et de la procréation (1). L’encyclique Humanae vitae de Paul VI (publiée en 1968 !) et les trois derniers papes n’y ont rien changé. Si le Polonais Jean Paul II (en place de 1978 à 2005), l’Allemand Benoît XVI (de 2005 à 2013) et l’Argentin François (depuis 2013) ont prêché contre la pauvreté et pour la miséricorde, ils ont comme leurs prédécesseurs condamné l’avortement, la contraception, la masturbation ou l’homosexualité, et traité les affaires d’abus sexuels par des religieux en les masquant et en couvrant leurs auteurs, même quand ils étaient poussés dans leurs retranchements.
La régulation des naissances par la « continence périodique »
Sur la question de la sexualité, la position du pape et celle des intégristes ne diffèrent guère (2) : l’amour des conjoints et la fécondité étant « par nature » imbriqués, il est interdit de recourir aux méthodes artificielles (préservatif, crèmes spermicides, stérilet et pilule) pour planifier les grossesses parce que, en le faisant, on coupe volontairement le lien créé par Dieu entre amour et fécondité. L’Église critique à juste titre la pilule comme étant un moyen pour les hommes de se décharger sur les femmes des problèmes que pose la contraception (notamment les conséquences physiques et psychologiques de son absorption pendant des années), et elle souligne à raison les gros enjeux financiers que son commerce représente – mais, venant d’elle, ces arguments sont pure démagogie.
Il en va de même lorsqu’elle prétend ne pas être contre la régulation des naissances parce qu’elle préconise les « méthodes naturelles », fondées sur le « cycle naturel de la femme » et une « paternité responsable » – autrement dit, tenant compte de la situation économique et sociale et de la santé des parents. Le catéchisme catholique universel stipule dans son point n° 2370 : « La continence périodique, les méthodes de régulation naturelle des naissances fondées sur l’auto-observation et le recours aux périodes infécondes sont conformes aux critères objectifs de la moralité. » Avec ces méthodes, l’homme et la femme respectent l’ordre divin puisqu’ils « s’unissent » lorsque le lien entre amour et fécondité est inopérant (3). CQFD : les périodes infécondes ont été prévues par Dieu pour permettre cette union sans procréation. La MAO (méthode d’auto-observation) promue par le couple Billings, et qui consiste à étudier la température du corps, le col de l’utérus et la glaire chez les femmes afin de cantonner leurs rapports sexuels aux seules périodes infécondes a pourtant comme résultat d’innombrables naissances non désirées !
Avorter, c’est « louer un tueur à gages » !
Pendant les premières années de son pontificat, François a été encensé par les médias pour ses discours sur l’écologie et le développement durable ; sur l’accueil des réfugiés syriens et les droits des Rohingyas ; contre l’individualisme, le consumérisme et l’exclusion (4), avec une dénonciation du libéralisme sauvage dans ce monde globalisé. Alors que Jean Paul II avait manifesté un anticommunisme viscéral, François a accepté de rencontrer des marxistes et les a même qualifiés de « gens bien » dans une interview accordée à La Stampa. Etc.
Mais, par rapport à l’avortement, il ne diffère pas de ses prédécesseurs. Jean Paul II considérait l’avortement comme un meurtre et une négation de la dignité de l’homme (5) – et à ses yeux la contraception ne valait pas mieux, c’était « les deux fruits d’une même plante ». En insistant sur l’efficacité absolue de l’abstinence et de la fidélité contre les maladies sexuellement transmissibles alors que le sida se propageait à la vitesse grand V sur la planète, il avait suscité l’indignation sans varier d’un iota. Et Benoît XVI lui avait fait écho, affirmant par exemple, lors d’un voyage en Afrique le 17 mars 2009, que l’on ne pouvait résoudre le problème du sida « en distribuant des préservatifs » car, « au contraire, ils augmentent le problème ». Lors de sa catéchèse consacrée le 10 octobre 2018 au commandement « Tu ne tueras pas », François a mis en garde les 26 000 fidèles rassemblé-e-s place Saint-Pierre, au Vatican, contre la « suppression de la vie humaine dans le sein maternel au nom de la sauvegarde d’autres droits », même en cas de viol d’une femme. Et il leur a fait hurler « non » à plusieurs reprises en leur demandant : « Est-il juste de mettre fin à une vie humaine pour résoudre un problème ? », « Est-il juste de louer un tueur à gages pour résoudre un problème ? »… avant de conclure : « Interrompre la grossesse signifie simplement “prendre une vie” (6). »
Pour les homos, c’est toujours « vade retro, satana » !
Peut-on être homosexuel et « bon catholique » ? D’après le site Église catholique de France, le Vatican répond oui. Mais peut-on ordonner prêtre un homosexuel ? Eh bien non, entre autres raisons parce « qu’une personne dont l’affectivité et l’élan sexuel sont “homo-orientés” ne peut répondre à ce qui est requis d’un homme [le prêtre] qui aura pour mission symbolique essentielle de représenter le Christ, époux de l’Église épouse ». Depuis Vatican II (1962-1965), les souverains pontifes maintiennent leur refus de la prêtrise pour les homos… tout en évitant de manifester à leur égard un rejet qui pourrait accentuer les défections dans les rangs des croyant-e-s. Les textes qui organisent la pratique des séminaires sont clairs : toute personne dont il est avéré que l’orientation affective et sexuelle « profondément enracinée » est de type homosexuel ne doit pas être présentée à l’ordination (7). Enfin, la position de l’Église pourrait-elle évoluer à ce sujet ? Encore non, parce qu’il y a « des domaines (ce qui relève de la foi et de la manière de la mettre en pratique au quotidien) qui ne sont pas soumis aux changements des cultures et aux évolutions de la société : ils sont le patrimoine même que Dieu a confié à l’Église pour qu’il soit transmis ».
Le pape actuel rejette les rapports et le mariage homos car ils « ferment l’acte sexuel au don de la vie » (8). Dans la même logique, il s’oppose aux opérations chirurgicales pour changer de sexe car elles rendent pour la plupart les trans stériles.
Le 26 août dernier, il a déclenché un tollé médiatique par son interview dans l’avion qui le ramenait d’une tournée en Irlande. A un journaliste qui lui demandait « ce qu’il conseillerait à un père auquel son enfant confie son homosexualité », il a en effet lâché : « Quand cela se manifeste dès l’enfance, il y a beaucoup de choses à faire par la psychiatrie, pour voir comment sont les choses. » Le service communication du Vatican a sucré la phrase dans son compte rendu officiel dès le lendemain, mais cette piètre façon de la nier n’a convaincu personne.
4 444 cas d’abus sexuels par des religieux en Australie : qui dit mieux ?
On le voit, les trois derniers pontifes n’ont pas chamboulé les sévères préceptes de l’institution religieuse romaine contre le « péché de chair ». Et de même, lorsqu’ils ont eu connaissance d’abus sexuels perpétrés par des religieux sur des mineur-e-s, ils ont suivi la ligne de conduite habituelle : « traiter » le problème en interne en cherchant à le dissimuler, et montrer davantage de mansuétude aux agresseurs qu’à leurs victimes.
Jusqu’au pontificat de Jean Paul II, les affaires de ce type concernant des prêtres étaient du ressort de leurs diocèses, et la culture du silence prévalait ; depuis 2001, les évêques sont obligés de faire remonter les dossiers à la Congrégation pour la doctrine de la foi, qui siège à Rome, mais l’Église n’a pas fondamentalement modifié son mode de fonctionnement. Quand les dénonciations visaient la hiérarchie religieuse, le pape polonais a toujours choisi de soutenir ouvertement les agresseurs – on l’a vu avec le cardinal Hans Hermann Groër, en Autriche, comme avec le père Marcial Maciel Degollado, fondateur des Légionnaires du Christ au Mexique. Sous la pression publique, Benoît XVI a fini par démissionner le premier en 1995, mais sans lui faire de procès canonique ; et de même pour le second : s’il a dû « renoncer à tout ministère public » en 2006, à 85 ans, il n’a pas été poursuivi au motif qu’il était d’un « âge avancé » et d’une « santé précaire ».
Les révélations d’abus sexuels qui se sont multipliées dans plusieurs pays, dégoûtant nombre de catholiques convaincu-e-s, ont bousculé les habitudes des pontifes – mais point trop. Quand, aux États-Unis, le Boston Globe a dévoilé en 2002 que le prêtre John Geoghan avait violé 80 enfants, des années durant, et que l’Église avait caché de semblables agissements (dont quelque 1 500 victimes ont fini par témoigner) émanant de plusieurs dizaines d’autres prêtres, le cardinal Law, archevêque de Boston, a démissionné. Jean Paul II, lui, a convoqué les 13 cardinaux américains et s’est déclaré… « profondément peiné ».
En 2009 et 2010, des affaires du même type ont éclaté sur la place publique : en Irlande où, dans le diocèse de Dublin, au moins 46 prêtres ont abusé de plus de 400 enfants au cours de trois décennies (9) ; en Allemagne, où 1 670 clercs ont agressé au moins 3 677 mineurs entre 1946 et 2014 ; aux Pays-Bas, en Belgique, etc. Benoît XVI a eu… des mots de compassion à l’égard des victimes, admis la responsabilité des évêques et condamné verbalement les prêtres concernés. Dans l’impossibilité d’étouffer le scandale, il a estimé en mars 2010 – dans sa Lettre pastorale aux catholiques irlandais – que certaines procédures pour évaluer les candidats au sacerdoce et à la vie religieuse étaient « inadéquates », qu’il y avait des « manquements » dans la formation des séminaristes et dans l’application des peines canoniques en vigueur, ainsi qu’une « préoccupation déplacée » de l’Église pour sa réputation – point barre.
Cette année, devant la déferlante de scandales sexuels impliquant cette Église – en Australie (4 444 cas d’abus entre 1980 et 2015 par 1 900 religieux identifiés, record battu ?), au Chili, en Allemagne, aux États-Unis (voir le premier encadré plus bas)… –, l’actuel pape, en visite en Irlande le 27 août, a demandé le pardon des fidèles pour de telles violences (10). Mais l’ancien nonce apostolique aux États-Unis, Carlo Maria Vigano, l’a alors accusé dans une lettre rendue publique d’avoir su au moins trois mois après son accession au pontificat que McCarrick, archevêque de Washington, mettait des séminaristes dans son lit. Et il a affirmé que les précédents papes étaient quant à eux au courant depuis novembre 2000 ; que Benoît XVI avait sanctionné ce cardinal pour ses actes mais que François avait levé la sanction, et n’avait demandé à McCarrick de rendre son titre ecclésiastique qu’en juillet, après les révélations parues dans la presse. Quoi qu’il en soit (11), le 29 septembre dernier, François a invité les fidèles du monde entier à… égrener un rosaire chaque jour d’octobre pour « protéger l’Église contre le diable (…) qui cherche toujours à nous diviser » !
Et l’Église de France, quel parapluie ouvrira-t-elle ?
Chez la « fille aînée de l’Église », l’épiscopat fait le dos rond sous ces pluies internationales de viols en tous genres, et ses défenseurs érigent des pare-feu. Par exemple en nous assurant que de tels actes nauséabonds sont des dérives anciennes ; ou que leur dénonciation est soit un complot d’anticléricaux visant à ternir l’image de la chrétienté, soit juste un moyen pour des avocat-e-s, aux États-Unis, de s’emplir les poches en attisant la hargne de leurs plaignant-e-s. Même si des cas anciens ou récents viennent régulièrement à la surface, les prêtres agresseurs sont souvent décédés quand le scandale éclate, ou alors il y a prescription – pratique. En octobre 2000, l’abbé Bissey a certes été condamné à dix-huit ans de prison par la cour d’assises du Calvados pour des abus sexuels commis sur 11 mineurs, et son supérieur, l’évêque Pican de Bayeux, à trois mois avec sursis pour non-dénonciation de crime, mais c’était une première.
Christian Terras, fondateur de l’hebdo catholique progressiste Golias, écrivait en mars 2016 : « Au total, au cours des trente dernières années, 20 000 dossiers d’ecclésiastiques impliqués ont été comptabilisés au Vatican, alors que le nombre de prêtres en exercice dans le monde atteint 400 000. C’est une proportion énorme. » Et il l’expliquait par « trois raisons : le contact avec les jeunes, le rapport pathologique à la sexualité et l’impunité qui caractérisent l’Église ».
Face à cet étalage de violences sexuelles émanant de religieux durant des décennies et aux défections qu’elles ont provoquées chez les croyant-e-s, l’hebdo catholique progressiste Témoignage chrétien a demandé le 29 septembre une « commission d’enquête élargie », estimant que pour l’Église « le retour de la crédibilité est à ce prix ». L’archevêque de Paris, Michel Aupetit, a approuvé dès le lendemain : « Pourquoi pas, bien sûr ! Si la société juge que c’est important pour davantage de clarté. » Le 7 novembre, les 118 évêques français réunis à Lourdes ont voté la création de cette « commission indépendante » pour « faire la lumière sur les abus sexuels sur mineurs dans l’Église catholique depuis 1950 » (12). Visiblement conscients qu’il y a le feu au lac (voir le second encadré plus bas), ils ont pour la première fois invité des victimes d’abus à témoigner, mais en choisissant sept personnes restées croyantes. Parmi elles, Véronique Garnier, n’en a pas moins déclaré : « Ce ne sont pas seulement quelques cas isolés de prêtres qui ont dérapé, d’évêques qui n’ont pas su gérer. C’est beaucoup plus grave. Il y a quelque chose de structurel, une sorte de structure de péché. Voilà pourquoi la réponse attendue est au niveau de l’Église entière. »
Les prélats ont également fait savoir qu’ils souhaitaient « proposer un geste financier » aux victimes, évitant de parler d’« indemnisation » ou de « réparation » pour que les personnes abusées ne puissent en demander même quand il y a prescription ou que leur agresseur est décédé – on n’est jamais trop prudent !
Dans la presse, on se demande si l’origine de ces violences sexuelles ne réside pas dans le célibat de la prêtrise latine (13), devenu une de ses règles au XIe siècle (notamment pour éviter que les biens de l’Église soient patrimonialisés par des prêtres désireux d’assurer l’avenir de leur descendance) ; la « fonction » d’une épouse – puisque le scénario reste hétéro et conjugal – serait donc de calmer les frustrations de pédophiles en puissance pour empêcher leurs perversions ? Ou alors on tente de banaliser le scandale planétaire de l’Église catholique en disant qu’il ne faut pas se cantonner à enquêter sur elle. François Devaux, président de l’association La Parole libérée – fondée en 2015 par des hommes que le prêtre lyonnais Bernard Preynat avait violés quand ils étaient scouts, entre 1986 et 1991 (14) –, pense ainsi qu’une commission d’enquête parlementaire devrait se pencher sur toutes les institutions.
En attendant, dans cette affaire Preynat, les victimes et leurs soutiens ont été profondément désorientés par le procès canonique qui a été instruit contre le curé. Personne ne comprenait rien au déroulement de la procédure vu sa complexité et son opacité ; il n’y avait pas d’avocat-e, pas de copie du procès-verbal des auditions. Puis le procès a carrément été suspendu du fait des délais de prescription pour 90 % des victimes…
Après un tel tableau, comment n’aurait-on pas envie de crier, à l’instar des femmes en mouvement dans les années 70 : « Ah, si Marie avait connu l’avortement, on aurait pas tous ces emmerdements »… que sont l’Église et la religion catholiques – et plus largement toutes les Églises et religions ?! »
Vanina
1. La Croix, qui le représente en France, rappelait encore le 17 février dernier que « l’acte sexuel se vit au sein du couple uni par un lien conjugal et ouvert à la procréation ».
2. Pour se rapprocher de ces derniers, Benoît XVI a par ailleurs réintroduit le port cérémonial de vêtements traditionnels, autorisé en 2007 les curés à célébrer la messe selon le rite antérieur à Paul VI sur simple demande des paroissien-ne-s accompagnée d’une lettre aux évêques, levé l’excommunication d’un Mgr Williamson qui avait tenu des propos négationnistes…
3. L’utiliser en permanence pour ne pas avoir d’enfants n’est cependant pas considéré comme légitime par le Vatican, parce que cela entre en contradiction avec l’idéal de l’amour humain et chrétien.
4. Ce pape a appartenu à l’Organisation unique du transfert générationnel péroniste, mais on l’en excuse au prétexte que celle-ci formait des cadres à l’organisation de structures sociales et l’évangélisation des pauvres – oh, alors tout va bien.
5. Dans Donum vitae, il a également condamné la fécondation artificielle, « technique moralement illicite parce qu’elle prive la procréation humaine de la dignité qui lui est propre et conaturelle » en détachant la fécondation de l’acte sexuel. Idem pour le clonage humain.
6. La défense du « droit à la vie » conduit l’Église à se prononcer aussi contre l’euthanasie, toute forme d’eugénisme et la peine de mort.
7. Même refus concernant la prêtrise pour les femmes. François explique que « le sacerdoce passe par l’homme. La femme possède une autre fonction dans le christianisme, reflétée dans la figure de Marie (…), le don de la maternité, de la tendresse ».
8. Il critique de plus le féminisme, estimant que « les féministes du XXe siècle ont obtenu ce qu’elles voulaient » et que la « théorie du genre » est une « colonisation idéologique ».
9. Le film Spotlight a raconté cette affaire en 2016.
10) Il y a été accueilli par 300 000 fidèles, contre 1 million pour Jean Paul II quarante ans pus tôt. Et, dans le centre de Dublin, 5 000 personnes ont participé à une manifestation intitulée « Debout pour la vérité » pour dénoncer les abus sexuels commis par des prêtres.
11. Ce Vigano, qui semble très homophobe et assez délirant, attribue les abus sexuels commis dans le cadre de l’Église à la présence de prêtres homos se trouvant dans l’entourage du pape afin de « subvertir la doctrine catholique sur l’homosexualité ».
12. Jean-Marie Sauvé, ex-vice-président du Conseil d’État, a été désigné pour la présider.
13. L’écrivaine Nancy Huston a ainsi suggéré récemment, dans une tribune du Monde, que le pape lève cette injonction.
14. En fonctions pendant vingt-cinq ans dans le diocèse de Lyon, il a été couvert par l’archevêque Barbarin dès 1991. Ce dernier est poursuivi pour non-dénonciation d’agressions sexuelles sur mineurs, mais son procès, reporté plusieurs fois, aura-t-il lieu en janvier 2019 comme annoncé ?
> ENCADRE 1
Les agressions sexuelles, des « comportements indécents » ?
En Pennsylvanie, un grand jury constitué de citoyens, sous la conduite d’un procureur et avec l’aide du FBI, a rendu le 14 août un rapport sur six des huit diocèses. Il désigne nommément près de 300 prêtres auteurs de viols ou d’agressions sexuelles commis depuis 1940 sur plus d’un millier de mineur-e-s, tandis que l’Église cachait ces méfaits dans des « archives secrètes » dont seul l’évêque avait la clé. Les supérieurs religieux ont ignoré ou minoré des cas, lorsqu’ils « enquêtaient ». Ils ont fait écran entre les agresseurs et la justice ou la police civile au moins jusqu’en 2000, ont maintenu des prédateurs au contact d’enfants en les déplaçant sans explications, ce qui a permis d’autres violences sexuelles ailleurs. Ils ont usé d’euphémismes pour ne pas parler carrément de viols ; et maintenu un soutien financier et logistique même pour les violeurs, en toute connaissance de cause. Un prêtre du diocèse d’Erié qui avait abusé de 15 jeunes garçons a été félicité par l’évêque pour ses « progrès » dans le contrôle de son « addiction » ; après qu’un autre a violé une jeune fille et l’a fait avorter car elle était tombée enceinte, cet évêque a écrit : « C’est un moment très difficile dans votre vie. Je partage votre douleur »… au prêtre et pas à la victime.
Seuls deux prêtres sont poursuivis par la justice, l’un pour avoir éjaculé dans la bouche d’un enfant de 7 ans, le second pour avoir agressé deux garçons chaque mois jusqu’en 2010. Concernant les autres, les faits sont prescrits parce qu’ils ont eu lieu avant les années 2000 ou que leurs auteurs sont morts. C’est pourquoi le rapport recommande de supprimer la prescription pour les victimes (elles ont actuellement jusqu’à leurs 50 ans pour se faire connaître) ; de leur donner deux ans pour demander des dommages et intérêts civils à l’Église catholique (présentement, il faut avoir dénoncé les faits avant ses 30 ans pour pouvoir être dédommagé-e) ; enfin, de mettre fin aux accords de confidentialité permettant aux prêtres d’échapper à la justice pénale.
Avant la publication de cette enquête, le Vatican avait pris les devants : des évêques avaient proposé à des victimes de les rencontrer et leur avait assuré que tout cela était du passé. La lecture du dossier établi par l’évêque d’Harrisburg, Ronald Gainer, et posté sur le site du diocèse prouve le contraire : les agressions sexuelles des prêtres y sont rangées dans la rubrique « comportements indécents » ; le fait qu’ils embrassent des enfants, dans les « comportements inappropriés »…
> ENCADRE 2
« La gardienne la plus stricte des comportements sexuels »
L’éditorial de la revue catholique de « culture contemporaine » Études, en juin 2010, constatait déjà, devant l’attitude du Vatican à l’égard des innombrables abus sexuels de prêtres livrés sur la place publique : « Les tentatives de relativiser ces affaires en disant que la majorité des actes de pédophilie se déroulent dans les familles, comme dans les institutions scolaires ou dans d’autres religions, n’enlèvent rien à l’ignominie de ces actes (…). Pour comprendre, sans l’excuser, la politique antérieure du silence, il faut revenir aux mentalités des années 70 et 80 où ont été commis la plus grande partie des actes de pédophilie. (…) L’habitude de l’Église d’être constamment sur la défensive devant les attaques du monde l’a fait se refermer sur elle-même devant ces révélations. (…) Ne nous étonnons pas aujourd’hui de l’explosion abyssale des actes et des paroles dans le contexte actuel d’exigence d’authenticité. D’autant que l’Église se veut la gardienne la plus stricte des comportements sexuels. (…) Nous sommes ainsi devant une des crises morales les plus graves de l’Église, qui devrait lui rappeler l’humilité de notre commune et mystérieuse humanité. »