★ MARCHER VERS L’UTOPIE...

Publié le par Socialisme libertaire

Utopie

MARCHER VERS L’UTOPIE, C’EST AVANCER LES PIEDS SUR TERRE
ET LA TÊTE DANS LES ÉTOILES
 

« Il y a 15 jours, je répondais, sur Facebook, à un compagnon libertaire perplexe devant mon implication dans la crise politique en Grèce. Comme la même question m’est à nouveau posé depuis hier, revoilà ma réponse :

RÉPONSE À UN COMPAGNON LIBERTAIRE PERPLEXE DEVANT MON IMPLICATION DANS LA CRISE POLITIQUE EN GRÈCE.

Cher Jacques, l’anarchie est également mon horizon politique, mais je doute que, dès demain matin, d’un coup de baguette magique, on puisse miraculeusement raser gratis, se nourrir, se soigner, dans une Grèce dévastée et très dépendante. Tout ça, juste en claquant des doigts et en taguant des A cerclés sur les murs.

Je ne crois pas aux miracles. Et, surtout, je ne jouerai pas avec le feu et la vie de 11 millions de personnes dont environ 300 000 qui sont en grande précarité, donc en danger de mort. 300 000 personnes qui ont déjà reçu 200 millions d’euros d’aides financières de ce gouvernement qui est tout de même très différent du précédent, plus de l’aide médicale, ainsi que de l’eau et de l’électricité gratuite ou à prix symbolique, malgré la quasi-faillite financière, les caisses vides et la violence incessante de la BCE, là où le gouvernement français fait exactement l’inverse.

Je vois ce qui n’est pas fait, Jacques, mais je vois aussi ce qui est fait. Et aucune idéologie ne me dictera ce que je dois voir ou occulter. J’évalue et choisis d’agir en situation et j’analyse également les raisons, les processus, au-delà de nos montagnes de préjugés qui nous éloignent souvent des réalités.

D’autre part, pour avancer vers l’utopie, il ne suffit pas de renverser le pouvoir, quel qu’il soit, mais il faut aussi et surtout renverser nos manières de penser et d’agir, c’est-à-dire notre imaginaire social. Et cela nécessite un travail d’éducation populaire, des débats, des convergences de luttes, des synergies et des rencontres au-delà du cadre des convaincus.

De plus, même si mon utopie est libertaire, je n’affirme pas détenir toute la vérité et mes camarades de la vraie gauche ou mes amis écologistes ne sont pas a priori plus bêtes que toi et moi. C’est donc également une affaire d’humilité que de se mêler à certaines luttes importantes, sans faire bande à part ni regarder de haut ceux qui relèvent leurs manches d’une façon un peu différente. Je suis pour l’égalité réelle, donc contre toute aristocratie de la pensée politique. J’observe parfois certains de mes compagnons se gargariser d’avoir les mains pures en restant sur le rebord du monde à ressasser des textes écrits il y a 150 ans en attendant le grand soir, au lieu de continuer à marcher vers l’utopie à travers des expériences hétérodoxes, mais fertiles.

Oui, ce qui se déroule en Grèce est hétérodoxe, y compris pour les gens de gauche et les écolos qui en perdent eux aussi leur latin. A fortiori pour nous.

Mais ce qui se passe en Grèce est une ligne de front à laquelle il serait fou de manquer. Ce qui se passe en Grèce dépasse nos petites personnes et nos diverses chapelles politiques. Ce qui se passe en Grèce est une fenêtre. Une fenêtre rare dans le temps et l’espace. Une fenêtre qu’il serait dommage de manquer, car elle pourrait ouvrir sur beaucoup de choses et bouleverser les perspectives. L’opportunité de provoquer l’échec des pires tyrans qui soient en Europe et donc de remotiver tout un continent plongé dans la résignation.

Qui te dit, Jacques, que ce qui se passe en Grèce n’ira pas plus loin, tôt ou tard ? Qui te dit que beaucoup de mes camarades et ami-e-s n’auront pas eux-mêmes le désir d’aller plus loin vers l’utopie, en avançant en si beau chemin ? Qui te dit qu’en luttant avec mes camarades et ami-e-s, je ne lutte pas aussi pour cette utopie qui nous est chère ?

Tout ce qui se passe en Grèce, dans sa grande diversité, depuis Exarcheia jusqu’au Parlement et à la commission pour l’audit de la dette, depuis les ZAD jusqu’au initiatives solidaires autogérées, tout ça, c’est pour moi l’un des berceaux d’un autre monde. Et ce berceau, pour rien au monde, je ne le laisserai piétiner.

Yanis Youlountas - 20 juin 2015

MARCHER VERS L’UTOPIE, C’EST AVANCER LES PIEDS SUR TERRE ET LA TÊTE DANS LES ÉTOILES.

MOYENS : les convergences de luttes, les synergies, les débats et les projets communs. OBSTACLES : le sectarisme, le dogmatisme, les préjugés et les logiques d’appareils. ENJEU : avancer, autant que possible, vers l’utopie en résistant, partout, au rouleau compresseur qui nous écrase, détruit toujours plus l’humain et la Terre, ainsi qu’au fascisme qui attend son heure en embuscade avec sa nébuleuse de complices. CLÉ, POINT DE BASCULEMENT : sortir de la résignation en décolonisant l’imaginaire et en libérant le désir et la volonté. Pour cela, il est indispensable de concilier utopisme et pragmatisme, radicalité et bienveillance, les pieds sur terre et la tête dans les étoiles. L’un sans l’autre ne mène à rien. Les deux articulés favorisent les victoires et les avancées vers l’utopie. RADICALITÉ : elle est cruciale, même si elle inquiète ou dérange parfois, parce qu’elle seule peut renverser nos manières de penser et d’agir. Elle vient en avançant hors des sentiers battus et de la fabrique de l’opinion, en rencontrant des idées et des expériences fortes et motivantes, en prenant conscience de nos capacités à nous organiser autrement, en regardant le monde d’une autre façon à chacun de nos pas. UTOPIE : liberté véritable, égalité réelle, fraternité universelle. SÉMANTIQUE : qu’on appelle ça anarchie, gauche ou révolution, peu importe : l’important, ce sont les faits. D’ailleurs, d’autres mots viendront peut-être avec le temps pour préciser ces objectifs.

Fraternellement à vous tou-te-s, camarades, compagnons et ami-e-s.

Y.Y. 7 juillet 2015

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