★ Qu’est-ce que le prolétariat ?

Publié le par Socialisme libertaire

Prolétariat

La mort du prolétariat ?

Voilà des années que l’on nous assène une évidence : le prolétariat est mort. La prétendue disparition de cette classe s’expliquerait par trois causes. En premier lieu, le prolétariat a souvent été confondu avec la classe ouvrière. La diminution de l’emploi industriel, la dispersion des grands centres de production conduiraient à l’extinction progressive du prolétariat (en France, aujourd’hui, les ouvriers ne représentent que 25 % de la population active contre 40 % dans les années 50). Telle une espèce en voie de disparition, le prolétariat s’épuiserait numériquement. Autre poncif : les classes moyennes (dont la définition reste floue) absorberaient progressivement le prolétariat. L’accès à la propriété ( ne serait-ce que d’un petit pavillon mal isolé), le mode de vie consumériste auraient suffi à mettre à mort le prolétariat. Enfin, le concept même de prolétariat a disparu du vocabulaire politique. Les partis de gauche, les syndicats l’ont abandonné au profit d’autres concepts : les travailleurs ou (de plus en plus) les citoyens. On assisterait donc à une disparition totale du prolétariat : comme catégorie sociale, comme mode de vie, comme concept politique. Qu’en est-il en réalité ? De quoi parle-t-on ? Que faut-il entendre par prolétariat ?

Qu’est-ce que le prolétariat ?

D’un point de vue révolutionnaire, le prolétariat ne peut être conçu comme un concept descriptif (une CSP pour parler le langage de la cuistrerie sociologique), mais comme un concept éminemment critique. Il doit être défini comme condition, c’est -à-dire dans la position occupée dans le rapport de production et de reproduction du capitalisme. Du point de vue du rapport de production, le/la prolétaire, c’est celui ou celle qui ne dispose que de sa force de travail pour survire et qui doit l’échanger contre un salaire. Le salariat, comme mode d’échange de la force de travail, constitue la première caractéristique de la condition prolétarienne. Mais il est évident que ceci ne suffit pas pour la définir. En effet, un PDG, un CRS, un maton sont aussi des salariés. Il faut tenir compte du rôle joué dans la reproduction du système capitaliste. Tout individu, en travaillant et en consommant participe à la reproduction du système capitaliste. Néanmoins, tout le monde n’y participe pas de la même manière. On peut exclure du prolétariat celles et ceux qui occupent une position décisionnaire ou hiérarchique (le/la PDG, le/la cadre supérieurE) ou qui ont pour fonction d’exercer la répression dans le cadre du maintien du système (armée, police par exemple). Le prolétariat n’est donc pas un concept sociologique ou économique, mais un concept révolutionnaire. Ce n’est pas le montant du salaire qui définit le/la prolétaire, mais la situation dans le rapport de production et de reproduction (contrairement à l’universitaire, le flic smicard ne peut être considéré comme un prolétaire). Nous proposons donc cette définition : le prolétariat désigne la classe de celles et ceux qui ne possèdent que leur force de travail pour survivre et qui n’exercent aucun pouvoir décisionnaire ou hiérarchique dans le maintien du système capitaliste. Cette définition présente un double intérêt. D’une part, en ne réduisant pas le prolétariat à une catégorie socioprofessionnelle, elle permet d’englober les catégories sociales en voie de prolétarisation ( artisans, paysans). D’autre part, elle met l’accent sur le fait que le/la prolétaire est avant tout celui ou celle qui n’a aucun intérêt dans la préservation du système.

Quelle est l’utilité de ce concept ?

Le concept de prolétariat présente une double utilité. Une utilité théorique. En effet, il permet de penser la classe des exploitéEs comme classe révolutionnaire. Pourquoi parler de prolétaire plutôt que de travailleur ou de travailleuse ? Tout d’abord, parce que travailleur/travailleuse désigne avant tout celles et ceux qui exercent un emploi. De plus, défendre les travailleurs et les travailleuses, c’est défendre leur condition dans le cadre du système capitaliste. C’est ce que font les syndicats réformistes quand ils luttent pour le pouvoir d’achat ou pour le maintien de l’emploi. En revanche, le concept de prolétariat permet de faire l’unité entre les travailleurs/travailleuses et celles et ceux qui sont privés d’emploi ou marginaliséEs. En outre, le prolétariat constitue la classe de celles et ceux dont l’intérêt est la disparition du prolétariat, dans la mesure où le renversement du capitalisme implique nécessairement la disparition des classes sociales. Autrement dit, le prolétariat est la classe qui vise sa propre destruction. Une utilité pratique. Depuis plusieurs années, les luttes sociales ont tendance à s’engluer dans un citoyennisme interclassiste : collectifs citoyens pour la défense des services publics, pour un audit citoyen sur la dette, mouvement des indignés pour la démocratie réelle, collectifs pour la défense des sans-papiers... Dans tous les cas, il s’agit de rassembler les bonnes volontés pour tenter d’humaniser le capitalisme en réduisant ses abus. Au contraire, situer les luttes dans une perspective prolétarienne permet de les inscrire dans le cadre de la lutte des classes et de mettre en avant le nécessaire renversement du système capitaliste.

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